15/04/2023
Des milliards de mystères (Barjavel)
Barjavel, La nuit des temps, pp. 306-310, Presses de la Cité
Le même jour, Coban ressuscité, Coban en danger de mort, l'équation de Zoran expliquée ou à jamais perdue. Les foules les plus obtuses comprirent que quelque chose de fabuleusement important pour elles était en train de se jouer près du pôle Sud, à l'intérieur d'un homme que la mort retenait par la main.
- Essayez de réaliser ce qui se passe à l'intérieur de cet homme. Le tissu de ses poumons est brûlé, en partie détruit. Pour qu'il puisse recommencer à respirer normalement, à survivre, et vivre, il faut que ce qui reste de ce tissu régénère ce qui n'existe plus. Lui dort encore. Il a commencé à dormir il y a 900 000 ans et il continue. Mais la chair de son corps est éveillée et se défend. Et s'il était lui-même éveillé, ça ne changerait rien. Il ne pourrait rien de plus. Ce n'est pas lui qui commande. Son corps n'a pas besoin de lui. Les cellules du tissu pulmonaire, les merveilleuses petites usines vivantes sont en train de fabriquer à toute vitesse de nouvelles usines qui leur ressemblent, pour remplacer celles que le froid ou la flamme a détruites. En même temps, elles font leur travail ordinaire, multiple, incroyablement complexe, dans les domaines chimique, physique, électronique, vital. Elles reçoivent, choisissent, transforment, fabriquent, détruisent, retiennent , rejettent, réservent, dosent, obéissent, ordonnent, coordonnent avec une sûreté et une intelligence stupéfiantes. Chacune d'elles sait plus que milles ingénieurs médecins et architectes. Ce sont des cellules ordinaires, d'un corps vivant. Nous sommes construits de milliards de cela, milliards de mystères, milliards de complexes microscopiques obstinés à leur tâche fantastiquement compliquée. Qui les commandes, ces merveilleuses petites cellules ? Est-ce que c'est vous, Vigmont ?
- Oh ! m'sieur...
- Alors, qui les commandes, vos petites cellules ? Qui leur ordonne de faire ce qu'elles ont à faire ? Qui les a construites comme il fallait pour qu'elles puissent le faire ? Qui les a mises chacune à sa place, dans votre foie, dans votre petite cervelle, dans la rétine de vos beaux yeux ? Qui ? Répondez, Vigmont, répondez !
- Je ne sais pas, m'sieur.
- Vous ne savez pas ?
- Non, m'sieur.
- Moi non plus, Vigmont. Et qu'est-ce que vous savez, à part ça ?
- Heu...
- Vous ne savez rien, Vigmont...
- Non, m'sieur.
- Dites-moi : « Je ne sais rien ».
- Je ne sais rien, m'sieur.
- Bravo ! Regardez-les les autres, ils irent, ils se moquent, ils croient savoir quelque chose. Qu'est-ce qu'ils savent, Vigmont ?
- Je ne sais pas, m'sieur.
- Ils ne savent rien, Vigmont. Qu'est-ce que je dessine au tableau, vous reconnaissez ?
- Oui, m'sieur.
- Qu'est-ce que c'est ? Dites-le.
- C'est l'équation de Zoban, m'sieur.
- Ecoutez-les rire, ces idiots parce que vous vous êtes trompé d'une consonne. Croyez-vous qu'ils en savent plus que vous ? Croyez-vous qu'ils savent la lire ?
- Non, m'sieur.
- Et pourtant ils sont fiers d'eux, ils rigolent, ils se moquent ; ils se croient intelligents, ils vous prennent pour un idiot. Est-ce que vous êtes idiot, Vigmont ?
- Je m'en fous, m'sieur.
- C'est très bien, Vgmont. Mais ce n'est pas vrai. Vous êtes inquiet. Vous vous dites : « Je suis peut-être idiot. » Je vous rassure : vous n'êtes pas diot ! Vous êtes fait des mêmes petites cellules que l'homme dont les poumons sont en train de saigner au point 612, exactement les mêmes que celles dont était fait Zoran, l'homme qui a trouvé la clé du champ universel. Des milliards de petites cellules suprêmement intelligentes. Exactement les mêmes que les miennes monsieur Vigmont, et les miennes sont agrégées de philosophie. Vous vpyez bien que vous n'êtes pas idiot !
- Oui, m'sieur.
- Tenez, le voilà l'idiot : Jules-Jacques Ardillon, premier partout depuis la sixième, grosse tête ! Il croit qu'il sait quelque chose, il croit qu'il est intelligent. Non, monsieur Ardillon, je crois et je sais que vous êtes idiot. Est-ce que vous savez lire l'équation de Zoran ?
- Non, monsieur.
- Et si vous saviez la lire, est-ce vous sauriez ce qu'elle signifie ?
- Je pense que oui, monsieur.
- Vous pensez !... Vous pensez !... Quelle chance ! Vous êtes un Ardillon pensant ! Vous auriez dans la poche la clé de la vie et de la mort. Qu'est-ce vous feriez, monsieur-Ardillon-pensant ?
- Heu...
- Voilà, monsieur Ardillon, voilà...
- Général, vous avez entendu les nouvelles ?
- Oui, monsieur le Président.
- Ce Co... comment ?
- Coban.
- ...Coban, ils l'ont réveillé.
- Ils l'ont réveillé...
- Ils vont peut-être le sauver ?
- Peut-être...
- Ils sont fous !
- Ils sont fous...
- Cette équation de machin, vous y comprenez quelque chose ?
- Moi, vous savez, les équations...
- Même au C.N.R.S, ils n'y comprennent rien !
- Rien !...
- Mais c'est pire que la Bombe !
- Pire...
- D'un autre côté, ça peut avoir du bon...
- Ça peut...
- Mais même ce bon, ça peut avoir du mauvais.
- Mauvais, mauvais.
- Pensez à la Chine !
- J'y pense.
- Mettez-vous à sa place !
- C'est un peu grand...
- Faites un effort ! Qu'est-ce que vous penseriez ? Vous penseriez. « C'est encore ces salauds de Blancs qui vont mettre la main sur ce truc. Au moment où nous allions les égaler, peut-être les dépasser, ils vont de nouveau prendre mille ans d'avance. Il faut pas. Il faut absolument pas. » Voilà ce que vous penseriez si vous étiez la Chine.
- Évidement... Vous croyez qu'ils vont saboter ?
- Saboter, enlever, attaquer, massacrer, je n'en sais rien. Peut-être rien du tout. Comment savoir avec les Chinois ?
- Comment savoir...
- Comment ! Comment savoir ? C'est votre métier de savoir ! Vous dirigez les S.R ! les S.R ce sont les Services de Renseignements ! On l'oublie un peu trop ! Vous tout le premier ! Surveillez la Chine, général ! Surveillez la Chine ! C'est de là que ça viendra...
La force internationale aéronavale stationnée au nord de Terre Adélie se déploya dans les trois dimensions en forme de bouclier, et resta en alerte vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Elle avait des yeux en l'air et au-dessus de l'air, et des oreilles jusqu'au fond de l'océan
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02/04/2023
Le gauchisme, cette faune adolescente
Il y a tant à apprendre lorsque l'on observe la faune et la flore locale. Je prends l'exemple de la ville du Béarn où j'étudie.
Des gens bloquent des universités. Mais après tout, si c'est pour une cause légitime, pourquoi pas?
Ils le font en continu, un premier jour, puis un deuxième, puis une semaine entière. Pour causer pareille agitation, la cause doit être noble et grande. Elle l'est assurément, c'est pour dire non à la réforme des retraites.
Ces mêmes gens se réunissent tous les jours pour voter un blocage, et effectivement bloquent toutes les entrées de deux gros bâtiments de la faculté. Personne ne semble s'opposer publiquement à eux.
Ils ont bloqué une faculté, et profitent de la lenteur du processus de décision (en l'occurrence le recours au Conseil Constitutionnel)pour perturber le cours de leurs études. Le prétexte est-il bon ? Je ne le nie pas. Mais ces gens qui usent de ce prétexte sont-ils dignes de faire usage de celui-ci ? Non. Pour au moins la grande majorité d'entre eux.
Le blocus (terme utilisé dans les opérations militaires notamment, ce qui donne du sérieux, et même un peu de prestige à leur démarche, qui consiste surtout à amasser des chaises devant les entrées de l'université et à rester assis toute la journée à ne rien faire) qu'ils effectuent n'a pas la moindre légitimité. Pourquoi, alors que je viens de dire que sur le fond ils auraient raison? Tout simplement parce que le motif profond de leur révolte est sans grandeur ni poésie.
Ces gens ne veulent pas lutter contre le règne du capitalisme de marché, ils ne se révoltent pas pour mettre fin à l'iniquité qui consiste à faire remplir les caisses de retraites publiques par les petites gens à la place, par exemple, des fraudeurs fiscaux, non, pas du tout. Les bannières derrière lesquelles ils se rangent peuvent dire l'inverse, elles sont néanmoins transparentes et ne cachent pas la réalité. La réalité profonde de leur être. Ces gens empêchent l'accès à la faculté parce qu'ils veulent travailler le moins possible, et s’arrêter le plus tôt possible.
Qui sont-ils d'ailleurs? Qui compose cette faune de pseudos-rebelles ? De vieux militants cgtistes et de jeunes gauchistes. Les jeunes hommes ne respirent ni la force ni le caractère, les jeunes filles sont laides. C’est mauvais signe: ces gens là ont tous les traits de la frustration et de l'échec, et ceux de l’adolescence éternelle, sans âge, et de la collaboration parfois malgré soi avec des intérêts pernicieux qui les dépasse.
Tous, en tout cas, sont à nos yeux les parasites de la révolte sociale authentique. Ils sont les meilleurs alibis de la droite des affaires qui elle n'attend que cela pour justifier sa propre domination. Comment ne pas renforcer son sentiment d'appartenir aux "tomorrowers" lorsqu'on voit tant de gens moralement si petits crier de « si grands mots »?
Vous me direz: Tu exagères, pourquoi ne pas leur donner un peu de crédit dans leur démarche? Peut-être que leurs ambitions sont plus hautes et que tu ne le sais pas?
Ma réponse est la suivante : Où étaient-ils tous au "temps de la Covid"?
Comparons la situation avec l'époque des confinements: De la part de ces mêmes gens qui bloquent la fac aujourd’hui, pas le moindre doute, pas la moindre contestation quant à la légitimité de toutes les mesures de restriction de nos libertés, qu’il s'agisse de la vaccination obligatoire pour l'accès à certains lieux, du port d'un masque dont l'efficacité est mise en doute par une partie du corps médical, pas la moindre inquiétude quant à la mise en place d'une application mobile capable de tracer et de révéler les mouvements et trajets des malades de la Covid-19. Sans parler, bien sûr, de l'utilisation d'un vaccin ARN messager qui n'a pas respecté les protocoles de sécurité utilisés pour tout vaccin traditionnel, et qui a pu permettre l'explosion des dividendes des propriétaires d'action des laboratoires pharmaceutiques.
Face à une telle absence de réflexion quant aux plus élémentaires privations, et au vu d’un tel acharnement quant à la défense de leurs droits à travailler le moins possible, comment ne pas rester perplexes ?
Nous sommes confortés dans notre analyse selon laquelle il existe, comme l'affirmait Evola, des "races de l'esprit ». Sans nul doute que ces abrutis n'appartiendront jamais à la race des aristocrates que mentionnait le Baron sicilien.
Ce n'est pas avec ces gens-là que la minorité révolutionnaire de l’avenir forgera le monde de demain.
Le pire sans doute est que beaucoup de Français, au fond, ne pensent pas autrement. Une leçon est à tirer pour nous tous : les Français réagissent d’abord aux atteintes à leur porte-monnaie. Notons le précieusement, pour savoir à quel moment il sera opportun de frapper…
Vincent de Téma
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26/03/2023
La grève ne sert à rien
Rubens - Saturne dévorant l'un de ses enfants (1636)
Je suis allé dans les manifestations. Sans le moindre début de conviction. Mais avec le temps s’est forgé une certitude : celle selon laquelle la grève à l’ancienne ne servait plus à rien. Si elle a un jour servi à quelque chose…
A entendre les vieilles organisations syndicales, la grève permettrait de faire reculer le mouvement, de mettre fin à une réforme scandaleuse et inique.
C’est un mensonge. Grossier et éhonté. Et ce parce que l’État profond et la finance seront toujours là. Macron, quantité négligeable, quittera le pouvoir dans quatre ans. Après lui comme avant lui l’Iniquité aura ses serviteurs. La grève n’a pas pour but de redresser les torts, mais au contraire, de parvenir à la normalisation des relations entre syndicats et gouvernement. Ces jeunes et vieux imbéciles médiatiques qui essaient d’étouffer les voix appelant au chaos, ne comprennent pas que face à l’injustice la plus absolue, il n’y a d’autre solution que l’Anarchie. Tout simplement parce que c’est d’elle que naîtra l’ordre nouveau, l’ordre de la Liberté Nouvelle.
La grève est une expression pour ceux qui estiment qu’ils n’ont pas d’ennemi, mais seulement des adversaires. La grande majorité des manifestants attendent un règlement pacifique du conflit. Ils n’aiment pas Macron, mais ils seraient prêts à lui serrer la main si celui-ci acceptait de retirer sa réforme, et pour certains, d’augmenter leur RSA.
« Les Français sont des veaux », aurait dit De Gaulle, nous dirions plutôt que beaucoup de Français sont des pigeons. Ceux-là peuvent bien piailler de colère autant qu’ils veulent. Jetez-leur des miettes, et ils viennent vous manger dans la main.
Ceux-là, on l’a compris, ne sont pas les descendants des sans-culottes. A moins que cette bonne race ne soit depuis à ce point dégénérée. Moi qui n’ai pas la moindre goutte de ce vieux sang gaulois dans les veines, je ne peux que le constater.
On me dira : Mais alors, que faire ? Rien ? Inadmissible !
Je répondrai : Rien. C’est admissible.
L’Ennemi est trop fort pour l’attaquer frontalement. Seul un cataclysme économique ou écologique pourrait obliger à des mesures drastiques qui seules obligeront les Français à choisir entre soumission nouvelle ou violence nouvelle. S’ils choisissent la seconde option nous, les révolutionnaires en paroles, devront être prêts à devenir révolutionnaires en actes.
Ce n’est pas la grève qu’il faut, c’est la souffrance. Les Français doivent souffrir pour être prêts à en découdre avec leurs oppresseurs. On peut juger cela malheureux, mais c’est le sang et la douleur de demain qui sauveront la France et l’âme des Français. Toute conciliation avec le gouvernement sera le tombeau du pays réel.
Vincent de Téma
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