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19/12/2014

Loup (Dictionnaire des Symboles)

 


 

Jean Chevalier/Alain Gheerbrant, Dictionnaire des Symboles, Loup (louve), pp. 672-674, aux éditions Robert Laffont/Jupiter, collection Bouquins

 

Le loup est synonyme de sauvagerie et la louve de la débauche. Mais le langage des symboles interprète ces animaux, on s'en doute, d'une façon infiniment plus complexe, du fait, tout d'abord, qu'à l'instar de tout autre vecteur symbolique, ils peuvent être valorisés positivement autant que négativement. Positif apparaît le symbolisme du loup, si l'on remarque qu'il voit la nuit. Il devient alors symbole de lumière, solaire, héros, guerrier, ancêtre mythique. C'est la signification chez les Nordiques et chez les Grecs où il est attribué à Belen ou à Apollon (Apollon lycien).

 

Le créateur des dynasties chinoise et mongole est le loup bleu céleste. Sa force et son ardeur au combat en font une allégorie que les peuples turcs perpétueront jusque dans l'histoire contemporaine , puisque Mustapha Kemal, qui s'était nommé lui-même Atatürk, c'est-à-dire Père des Turcs, avait reçu de ses partisans le surnom de loup gris.

 

Le peuple turc qui, rassemblé autour de lui, menait le combat pour retrouver son identité, menacée par la décadence de l'Empire ottoman, reconduisait ainsi une très ancienne image : celle de l'ancêtre mythique de Gengis Khan, loup bleu, cratophanie de la lumière ouranienne (foudre) et dont l'union avec la biche blanche ou fauve, représentant la terre, plaçait à l'origine de ce peuple la hiérogamie terre-ciel.

 

Les peuples de la Prairie nord-américaine semblent avoir interprété de la même façon la signification symbolique de cet animal : Je suis le loup solitaire, je rôde en maints pays, dit un chant de guerre des Indiens de la Prairie (ALEC, 233).

 

La Chine connaît également un loup céleste (l'étoile Sirius) qui est le gardien du Palais céleste (la Grande Ourse). Ce caractère polaire se retrouve dans l'attribution du loup du Nord. On remarque toutefois que ce rôle de gardien fait place à l'aspect féroce de l'animal : ainsi, dans certaines régions du Japon, l'invoque-t-on comme protecteur contre les autres animaux sauvages. Il évoque une idée de force mal contenue, se dépensant avec fureur mais sans discernement.

 

La louve de Romulus et Rémus est, elle, non pas solaire et céleste, mais terrienne, sinon chthonienne. Ainsi, dans un cas comme dans l'autre, cet animal reste associé à l'idée de fécondité. La croyance populaire, en pays turc, a jusqu'à nos jours conservé cet héritage. Parmi les bézoards appréciés par les Yakoutes, en Sibérie, celui du loup est considéré comme le plus puissant ; en Anatolie, c'est-à-dire à l'autre extrémité de l'extension géographique des peuples altaïques, on voit encore des femmes stériles invoquer le loup pour avoir des enfants. Au Kamchatka à la fête annuelle d'octobre, on fait une image de loup en foin et on la conserve un an pour que le loup épouse les filles du village ; chez les Samoyèdes on a recueilli une légende qui met en scène une femme qui vit dans une caverne avec un loup (ROUF, 328-329).

 

Cet aspect chthonien ou infernal du symbole constitue son autre face majeure. Elle semble restée dominante dans le folklore européen, comme en témoigne, par exemple, le conte du Petit Chaperon rouge. On le voit déjà apparaître dans la mythologie gréco-latine : c'est la louve de Mormolycée nourrice de l'Achéron, dont on menace les enfants, exactement comme, de nos jours, on évoque le grand méchant loup (GRID, 303 a) ; c'est le manteau de peau de loup dont se revêt Hadès, maître des Enfers (KRAM, 226) ; les oreilles de loup du dieu de la mort des Étrusques ; c'est aussi, selon Diodore de Sicile, Osiris ressuscitant sous forme de loup pour aider sa femme et son fils à vaincre son frère méchant (ibid.).

 

C'est aussi une des formes données à Zeus (Lykaios), à qui on immolait en sacrifice des êtres humains, aux temps où régnait la magie agricole, pour mettre un terme aux sécheresses, aux fléaux naturels de toute sorte : Zeus déversait alors la pluie, fertilisait les champs, dirigeait les vents (ELIT, 76).

 

Dans l'imagerie du Moyen Age européen les sorciers se transforment le plus souvent en loups pour se rendre au sabbat, tandis que les sorcières, dans les mêmes occasions, portent des jarretelles, en peau de loup (GRIA). En Espagne, il est la monture du sorcier. La croyance aux lycanthropes, ou loups-garous, est attestée depuis l'Antiquité en Europe ; Virgile en fait déjà mention. En France, à peine commençait-on à en douter sous Louis XIV (PLAD). C'est une des composantes des croyances européennes, un des aspects sans doute que revêtent les esprits des forêts.

 

Selon Collin de Plancy, Bodin raconte sans rougir qu'en 1542, on vit un matin cent cinquante loups-garous sur une place de Constantinople.

 

Ce symbolisme de dévorateur est celui de la gueule*, image initiatique et archétypale, liée au phénomène de l'alternance jour-nuit, mort-vie : la gueule dévore et rejette, elle est initiatrice, prenant, selon la faune de l'endroit, l'apparence de l'animal le plus vorace : ici le loup, là le jaguar*, le crocodile*, etc. La mythologie scandinave présente spécifiquement le loup comme un dévorateur d'astres (DURS, 82), ce qui peut être rapproché du loup dévorateur de la caille*dont parle le Rig-Veda. Si la caille est, comme nous l'avons noté, un symbole de lumière, la gueule du loup est la nuit, la caverne, les enfers, la phase de pralâya cosmique ; la délivrance de la gueule du loup, c'est l'aurore, la lumière initiatique faisant suite à la descente aux enfers, le kalpa (CHRC, DANA, DEVA, GUED, GUES, MALA, MASR, RESE, SOUN).

 

Fenrir, le loup géant, est un ennemi les plus implacables des dieux. Seule la magie des nains peut arrêter sa course, grâce à un ruban fantastique que nul ne peut rompre ou couper. Dans la mythologie égyptienne, Anubis, le grand psychopompe, est appelé Impou, celui qui a la forme d'un chien sauvage (ibid.) ; on le révère à Cynopolis comme dieu des enfer (voir chacal*).

 

Cette gueule monstrueuse du loup, dont Marie Bonaparte parle dans son auto-analyse, comme étant associée aux terreurs de son enfance consécutive à la mort de sa mère, n'est pas sans rappeler les contes de Perrault : Grand-Mère, comme tu as de grandes dents ! Il y a donc, observe G; Durand, une convergence très nette entre la morsure des canidés et la crainte du temps destructeur. Kronos apparaît ici avec le visage d'Anubis, du monstre dévorant le temps humain ou s'attaquant même aux astres mesureurs de temps.

 

Nous avons déjà parlé du sens initiatique de cette symbolique. Ajoutons qu'elle donne au loup comme au chien un rôle de psychopompe.

 

Un mythe Algonquins le présente comme un frère du démiurge Menebuch, le grand lapin*, régnant à l'Ouest, sur le royaume des morts (MULR, 253). Cette même fonction de psychopompe lui était reconnue en Europe, comme ne témoigne ce chant mortuaire roumain :

 

Paraîtra encore

Le loup devant toi

...

Prends-le pour ton frère

Car le loup connaît

L’ordre des forêts

...

Il te conduira

Par la route plane

Vers un fils de Roi

Vers le Paradis

(Trésor de la poésie universelle, par R. Caillois et J.-C; Lambert, Paris, 1958)

 

Notons pour conclure que ce loup infernal, et surtout sa femelle, incarnation du désir sexuel, constituent un obstacle sur la route du pèlerin musulman en marche vers La Mecque, et plus encore sur le chemin de Damas, où elle prend les dimensions de la bête de l'Apocalypse.

 

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Une actualité en armes (Jean Parvulesco)

 

Jean Parvulesco, La confirmation boréale, Sur le grand tournant actuel du gaullisme, Une actualité en armes, pp. 256-258, aux éditions Alexipharmaque 

 

« Moi je dis qu'il faut faire l'Europe avec pour base un accord entre Français et Allemands. Une fois l'Europe faite sur ces bases, alors, on pourra se tourner vers la Russie. Alors, on pourra essayer , une bonne fois pour toutes, de faire l'Europe tout entière avec la Russie aussi, dut-elle changer son régime. Voilà le programme des vrais Européens. Voilà le mien. » En prenant ces positions tout à fait claires, et définitives, lors d'une conférence de presse en 1949, le Général de Gaulle avait, d'avance, tout dit : l'extrême actualité de son discours le prouve encore, cinquante ans après. Pour la première fois, la Russie y apparait comme un élément fondamental de l'Europe de l'après-guerre, de l'Europe grand-continentale,  « eurasiatique ». Or il est absolument évident que, à l'heure présente, c'est bien la Russie qui propose et engage l'alternative finale à la mise en place de la plus Grande Europe, en train d'être révolutionnairement mobilisée sur l'axe transcontinental Paris-Berlin-Moscou.

 

Exprimée, par Jacques Chirac, fin août 2002, lors de la conférence des ambassadeurs de France à Paris, la décision de se saisir du 40ème anniversaire - en janvier 2003 - du « Traité de l’Élysée » de Gaulle-Adenauer pour mettre en place un Pacte Refondateur franco-allemand et une relance en force de l'Europe grand-continentale incluant, fondamentalement, la participation de la Russie, participation dont Jacques Chirac avait renouvelé les bases lors de son voyage, en juillet 2002, en Crimée, pour y rencontrer Vladimir Poutine, fait que, à partir de maintenant, l'Europe grand-continentale est, en principe, déjà, chose faite : nous venons de gagner la partie. Même si on ne le sait pas encore, le processus de la mise en œuvre de la plus Grande Europe continentale se trouve, à l'heure actuelle, irrévocablement enclenché.

 

Ainsi, cinquante ans après la déclaration du Général de Gaulle concernant l'avenir de la plus Grande Europe continentale franco-allemande s'appuyant sur la Russie, le « grand dessein » fondamental du gaullisme, se trouve pratiquement réalisé, ou en voie de l'être.

 

Or la nouvelle donne européenne décisive provenant, donc, de l'émergence politico-historique de la « Nouvelle Russie » de Vladimir Poutine, formidable bloc continental engageant le heartland géopolitique du « Grand Continent » eurasiatique dans le sens de son rétablissement impérial-révolutionnaire final, fait aujourd'hui de l'Europe la forteresse politico-stratégique d'horizon suprahistorique et eschatologique préfigurant l'Imperium Ultimum, l'avènement du Regnum salvateur de l'histoire de la fin et de l'au-delà de la fin de l'histoire.

 

Le « grand gaullisme », le « gaullisme de la fin », apparaît ainsi comme l'agent opérationnel d'une certaine fin apocalyptique de l'histoire, et du passage vers les temps autres, vers les « temps secrets », « inprépensables », de la transhistoire finale dans sa marche eschatologique à contre-courant.

 

Si c'est bien l'axe transcontinental Paris-Berlin-Moscou qui, désormais, sera appelé à faire la « grande histoire », c'est en France qu'à l'heure actuelle se situe l'épicentre opérationnel de celle-ci : en anéantissant la conspiration trotskiste subversivement installée au pouvoir sous ses dissimulation socialistes, la droite française s'est donnée aujourd'hui une majorité totale, incarnée, au niveau politico-administratif, par le « parti unique » de l' « Union pour la Majorité Présidentielle » (UMP), « parti unique » au sein duquel l'appareil gaulliste pourra à présent manœuvrer le courant porteur de la stratégie de pointe qui entraînera le reste. C'est désormais à l'intérieur de l'UMP que le gaullisme installera son « camp retranché » politico-stratégique, c'est depuis l'intérieur de l'UMP que le gaullisme va devoir agir. Cette situation, peut-on le dire, était prévue depuis longtemps.

 

Déjà, dans Les fondements géopolitiques du grand gaullisme, j'écrivais : « Le pouvoir - où ne fût-ce qu'une certaine situation de pouvoir - représente la condition même d'une clandestinité supérieure : la véritable clandestinité n'est pas du tout celle du combat contre le pouvoir en place, mais la clandestinité poursuivie, précisément, à travers le pouvoir en place. Loin de cesser ses menées avec son arrivée au pouvoir, la grande clandestinité ne fait alors que changer de registre, en se donnant sur place les moyens de sa continuation décisive, engagée sur le parcours de son achèvement total. Hors du pouvoir, toute clandestinité est subalterne. » Et ensuite : « Une conspiration aux destinées ultimes ne visera le pouvoir politique, ou gouvernemental, qu'au titre conspirationnel d'une nouvelle étape de franchie sur la montée de sa propre spirale conspirationnelle. Une fois au pouvoir, ce que l'on peut appeler une conspiration ultime se dédouble pour conspirer contre elle-même, contre la partie d'elle-même chargée de faire semblant de céder aux assujettissements du pouvoir. »

 

Tel est le grand tournant actuel du gaullisme qui, en fin de course et au moment de sa nouvelle montée au pouvoir, aussi inattendue que totale, doit à nouveau rentrer dans l'ombre, s'inventer une nouvelle forme de clandestinité stratégique, tout comme à ses premiers débuts, au temps de la résistance à l'occupation allemande de la France. Mais n'est-ce pas contre une nouvelle occupation étrangère que le portent, aujourd'hui encore, ses nouveaux combats ? Le combat pour la libération continentale n'est-il pas essentiellement le même que l'ancien combat pour la libération nationale ? Ces interrogations sont peut-être tragiques, mais la situation à laquelle le gaullisme doit aujourd'hui faire face, n'est-elle pas une situation de tragédie ? Le gaullisme, aujourd'hui, se trouve souterrainement engagé à la pointe des combats décisifs pour la plus Grande Europe, et c'est là que s'accomplit son suprême destin, le destin secret d'une certaine « France secrète ». précédent : Le « génie du renouveau »

 

 

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12/12/2014

Charles de Gaulle, l'homme à contre-courant (Jean Parvulesco)

 

Jean Parvulesco, La confirmation boréale, Sur le grand tournant actuel du gaullisme, Charles de Gaulle, l'homme à contre-courant, pp. 233-239, aux éditions Alexipharmaque

 

Sans nourrir l'ambition d'un dévoilement, d'une mise au jour intégrale de l' "autre face", de la face occulte, nocturne, interdite de la carrière de Charles de Gaulle, de son cheminement en tant que "concept absolu", processus de dévoilement qui ne saurait être envisagé dans le cadre d'une simple approche du problème, qui demanderait les dispositions de tout un livre, je vais quand même tenter d'y fournir un certain nombre de stations de mise au jour, d'avens - de puits - donnant directement sur les profondeurs du cours souterrain de sa vie. Cependant, même ainsi quelque peu ébréché, le mystère de l' "autre" Charles de Gaulle n'en restera pas moins intact, à proprement parler inexplorable, parce qu'il appartient à une zone de la réalité qui n'est substantiellement en rien redevable de nos interrogations raisonnables, et encore moins soumise à leurs sollicitations, qui ne suit que seule la démarche réservée de ses propres développements irrationnels.

 

Aussi allons-nous, dés le commencement, nous trouver devant le problème des origines mêmes de Charles de Gaulle, des souches de sang immémoriales qui sembleraient avoir été souterrainement les siennes, parce que s'il s'avère que l'homme du 18 juin descend des anciens rois d'Irlande, que, par les souches guerrières des Mac Cartan et de Glana Rodry, son sang remonte jusqu'au roi Rudricus le Grand, il reste aussi toute une autre zone inexplorée du problème de ses origines - encore que très précisément à l'heure actuelle en cours d'exploitation, dans le cadre d'une certaine recherche fort confidentielle - qui le situerait dans la mouvance ultra-secrète des descendances mérovingiennes. Mouvance qui, par ailleurs, s'apprêterait à refaire surface prochainement, parce que certains estiment déjà que l'heure en serait en effet venue. Ce qui replacerait les choses dans une perspective autrement plus décisive quant à la prédestination significative ayant régi, dans l'ombre, la carrière déjà suprahistorique du "concept absolu" Charles de Gaulle, carrière dont les incidences mystérieuses n'ont cessé d'en visiter le devenir, comme par des brusques éclaircies, des coups d'éclair inattendus, tout le long de son cours. Sans cesse.

 

Alors, citons donc également, en continuation, les temps de la captivité du jeune capitaine Charles de Gaulle pendant la première guerre mondiale, temps qu'il avait passés à la forteresse d'Ingolstadt, en Haute Bavière, sur le Danube, ville depuis longtemps sous l'emprise de la Société de Jésus. Pendant sa captivité à Ingolstadt, Charles de Gaulle avait eu comme compagnon, parmi d'autres, le futur Maréchal Mikhaïel Toukatchevsky, Chef de l'Armée Rouge, que Staline avait fait exécuter à la veille de la dernière guerre, et pour visiteur apostolique le Nonce à Berlin, le futur Pie XII. Alors que le commandant de la forteresse d'Ingolstadt était un des proches du général Eric von Ludendorff, élève de Schlieffen, Chef de l’État-major Impérial et, par la suite, adjoint du Maréchal Hindenburg. Or nous connaissons l'orientation personnelle très spéciale du général von Ludendorff, ainsi que ses conceptions occultistes de haut vol, celles-ci se trouvant, aussi, à l'origine de tout un courant initiatique grand-germanique d'importance, dont les positions rejoignaient les doctrines secrètes que professait, à ce moment-là, le futur Maréchal Toukatchevsky : reconstituer la grandeur continentale des anciens peuples européens, de l'Irlande à la Russie, en les faisait revenir au culte de leurs anciens dieux originels, et pour ce faire éliminer le christianisme par la force. relevons aussi que le Maréchal Toukatchevsky avait été un très haut initié de l'Ordre des Polaires, et qu'il avait introduit des "loges polaires" d'officiers au sein de l'Armée Rouge.

 

Il régnait dans la forteresse d'Ingolstadt, lors du séjour qui y avait fait le jeune capitaine de Gaulle, une profonde atmosphère de conspiration occultiste et para-religieuse dont un autre des prisonniers présents là, Rémy Roure, par la suite grande figure de la Résistance, a laissé un livre de souvenirs, actuellement introuvable, qui ne citait pas tous les noms de ses compagnons - encore que l'on aurait eu quelques surprise, et de taille, s'il l'avait fait - mais qui en disait long - encore que pas tout - au sujet des influences qui s'exerçaient, intensément, sur les compagnons d'une captivité en fait fort orientée, faisant en quelque sorte fonction de séminaire sous la conduite d'une direction allemande à la fois invisible et omniprésente, ayant peut-être mission d'y poursuivre une expérience clandestine d'endoctrinement inconscient. Une citation : "Sur les bords du Danube, à Ingolstadt, les acteurs essentiels du prochain drame continentale étaient donc rassemblés sur place, comme par l'exercice d'une volonté à la fois occulte et suprême, insalissable, suprahumaine." Je persiste à croire, quant à moi, que quelque chose de tout à fait décisif avait eu à se passer, secrètement, à Ingolstadt, dans le tréfonds de la conscience du jeune capitaine de Gaulle inconsciemment sollicitée.

 

Dans le le même ordre d'idées, on peut encore rappeler la tentative faite, en 1936, à Nancy, par le général Giraud, alors commandant en chef de la région militaire, en vue d'établir une relation opérative entre Charles de Gaulle et Eugène Deloncle, qui s'était fait accompagner, lors de cette première - et dernière - réunion, par son adjoint, le général Henri Duseigneur. Eugène Deloncle cherchait à ce moment-là à trouver un chef militaire pour son organisation naissante, émanation sur le terrain du Mouvement Synarchique d'Empire, et avait songé pour cela au déjà prestigieux jeune officier qu'était alors Charles de Gaulle, Raymond Abellio : "Pour qu'une telle société fonctionne, il suffira d'un homme. L'épicentre n'est pas un lieu, c'est un homme qui est en communication avec les forces cosmiques et divines et les transmet aux autres."

 

Je crois savoir que lors de cette rencontre - à laquelle, d'ailleurs, Charles de Gaulle avait refusé de donner suite - les positions initiatiques occultistes du Mouvement Synarchique d'Empire, qui accomplissait l'enseignement ultra-secret d'Alexandre Saint-Yes d'Alveydre, avaient été ouvertement évoquées, ce qui avait dû ouvrir devant Charles de Gaulle une perspective abyssale sur les fondations cachées de la "grande histoire", d'une certaine "grande histoire" occulte, "interdite".

 

Le général de Gaulle avait d'ailleurs eu l'occasion d'approcher de très près les dimensions occultes de la temporalité suprahistorique, cosmique et suréveillée quand, pendant la dernière guerre, à Londres, il s'était fait initier, par Denis Saurat, aux doctrines métacosmiques de Hans Hörbiger, la Glazialkosmogonie. Plus tard, alors qu'il se trouvait déjà à l'Elysée, le général de Gaulle devait se faire également révéler les positions les plus intérieures, les plus "prohibées" d'un certain soufisme des degrés ultimes, par Michel Vâlsan, l'héritier spirituel de René Guénon. Certains ont évoqué à ce sujet "les longues promenades dans les jardins de l’Élysée du général de Gaulle et de Michel Vâlsan, qui s'entretenaient, en marchant, de certains problèmes dont on n'avait pas à savoir." Maintenant, on sait.

 

Enfin, ainsi qu'il est fort clairement précisé dans Le Livre des Compagnons Secrets du R.P. Martin, le général de Gaulle avait désigné, à titre testamentaire, comme guide spirituel suprême de ses compagnons présents et à venir, René Guénon et l’œuvre, d' "origine polaire, suprahumaine" de celui-ci. Ce qui veut signifier que, en quelque sorte, la boucle est bouclée ; on arrive là où il fallait que l'on arrivât, et tout est dit pour ceux qui savent comprendre. Car René Guénon est, en l’occurrence, un seuil. Un seuil de reconnaissance, un seuil d'épreuve, un seuil d'aveu. A partir de cette prise de position de la part du "concept absolu" Charles de Gaulle, nul doute n'est plus permis : l' "homme du contre-courant" portait en lui, secrètement, l'inextinguible lumière de l’Étoile Polaire. Ainsi qu'il l'a prouvé.

 

Dés la fin de la dernière guerre, déjà en mai 1945, l'organisation catholique souterraine "Le Circuit" reprenait hâtivement du service, pour contrer, en Europe, les dangereuses avancées du nouveau totalitarisme venant de l'Est, et s'appuyant, pour ce faire, en premier lieu, sur le général de Gaulle au pouvoir à Paris, ainsi que sur l'action confidentielle d'ensemble que menait, depuis Rome, Pie XII. Des choses extraordinaires avaient alors été faites, souterrainement, dont on ne saura peut-être jamais rien. Mais il se fit aussi que, avec le départ du général de Gaulle du pouvoir, en 1946, le centre de gravité de l'entreprise clandestine de sauvetage politique de l'Europe mené par celui-ci avait dû se trouver aussitôt déplacé sur l'Autriche, à Innsbruck, capitale de la zone d'occupation militaire française. Où le Haut-commissaire français, le général Béthouart, qui jouissait de toute la confiance personnelle de Charles de Gaulle, avait transformé l'ensemble de la zone d'occupation militaire française en Autriche en un territoire de résistance à juridiction secrète, clandestine, en une "Forteresse Blanche des Alpes", sur laquelle seule régnait, en fait, la loi militaire de la révolution nationale et européenne gaulliste. La "Forteresse Blanche des Alpes", incarnation secrète d'un concept gaulliste européen révolutionnaire, base contre-stratégique d'un nouvel "activisme polaire". L'expression de "Forteresse Blanche des Alpes" avait été inventée, personnellement, par Alan Dulles, qui, depuis son ancien repaire de Berne, observait ce qui s'y passait, souvent, de tout à fait incroyable, en apportant, lui aussi, parfois, par l'intermédiaire du prince de Hohenlohe, son soutien clandestin à l'action contre-stratégique européenne mené, depuis Innsbruck, par le général Béthouart et son groupe d'intervention agissant dans l'ombre. L'Europe, en ces temps-là, se survivait sur les ultimes hauteurs des Alpes, où les forces armées françaises gardaient le feu vivant.

 

La période de rayonnement de la "Forteresse Blanche des Alpes" avait été le sommet de l'action contre-stratégique française dans l'Europe mortellement blessée de l'immédiate après-guerre, le sommet aussi d'une certaine action clandestine européenne de grande envergure du gaullisme avant que le général de Gaulle ne revienne au pouvoir en 1958. De 1946 à 1958, l' "homme de tempêtes" aurait-il pu cessé d'agir ?

 

D'autre part, pendant les dernières années de sa "traversée du désert", le général de Gaulle avait soutenu dans l'ombre, en y déléguant, chaque année, au titre de de ses représentants personnels, Edmond Michelet et Louis Terrenoire, la "Conférence de l'Escurial", où, sous le patronage personnel de l’Archiduc Otto de Habsbourg, on s'employait à préparer, secrètement, les plans à longue portée pour la reconstitution politique du Saint Empire Romain Germanique. Le choix, pour ce faire, de l'Espagne, et plus particulièrement de l'Escurial, n'était pas sans avoir eu sa signification : l'Escurial figurait la place-forte suprahistorique suprême des Habsbourg et partant de leur plus Grande Europe catholique et impériale, modèle abyssal de cette nouvelle Grande Europe impériale, "eurasiatique", qui constituait, dés ces temps-là, l'objectif ultime de la vision révolutionnaire impériale secrète du général de Gaulle.

 

Il resterait aussi à parler des trois derniers voyages testamentaires du général de Gaulle - du "concept absolu" Charles de Gaulle - voyages effectués après qu'il eût quitté une deuxième fois le pouvoir en 1969, en Espagne, ensuite en Irlande et, pour terminer, et veillant à ce que cela ne se sache pas, en Allemagne.

 

Je reste fortement convaincu que c'est bien dans la figure chiffrée de ses "trois derniers voyages" qu'il faudra chercher la clef d'une certaine intelligence hermétique du "concept absolu" Charles de Gaulle, parce que chacun de ces trois voyages correspondent à une des options abyssales, suprahistoriques, de la politique souterraine de celui-ci, l'Espagne, l'Irlande, l'Allemagne - une certaine Allemagne - représentant les trois pôles occultes de son action impériale grande-européenne, "eurasiatique", le dépassement révolutionnaire impériale des positions exclusivement françaises qu'il lui avait fallu forcément faire siennes lors de son dernier passage au pouvoir : avec ses "trois derniers voyages", le "concept absolu" Charles de Gaulle avait rejoint enfin l'horizon de sa plus juste identité dogmatique, le niveau ultime de ses habilitations impériales les plus cachées.

 

Si l'on sait à peine qui est-il allé voir et par où il est passé en Espagne et en Irlande, on ignore tout, par contre, et sans doute à jamais, de sa dernière visite hors de France, celle qui l'avait amené clandestinement en Allemagne. Dernier "pèlerinage" dont non seulement le but de Charles de Gaulle l'avait tenu caché, mais jusqu'au pèlerinage lui-même : sans aucune justification, sans témoins ni accompagnateurs, quels qu'ils fussent, avec un cérémonial hors de toute attention non prévenue, plongé dans le plus grand secret jusqu'au bout. Il y a là, d'évidence, de quoi se poser un certain nombre de questions aussi troublantes que dangereuses, et qu'il vaut peut-être mieux - dans l'état actuel des choses - ne pas se poser du tout, faire provisoirement l'impasse là-dessus.

 

En dernière analyse, on pourrait donc établir l'enseignement central du gaullisme comme celui du combat à contre-courant contre l'aliénation finale de l'histoire actuelle, et contre le cortège obscène de décadences qui s'en ensuivent ; et comme, aussi la volonté intraitable, farouche, héroïque et suprahumaine de ne jamais céder devant les évidences négatives de l'histoire en cours, quelles qu'elles fussent, de toujours se maintenir debout. Toujours à contre-courant, dans le sens contraire à celui de la terre qui tourne, toujours dans la souvenance immémoriale de nos origines polaires, supratemporelles, "divines". C'est dans le plus lointain passé que l'on trouvera la source vive, héroïque, de l'engagement révolutionnaire qui nous portera en avant vers cet au-delà de l'histoire qui constitue l'espace même de la vision impériale propre du gaullisme qui constitue l'espace même de la vision impériale propre du gaullisme, du "grand gaullisme, du "gaullisme de la fin". Tout le gaullisme se retrouve dans le verbe tenir. Charles de Gaulle : "Il n'y a qu'une seule fatalité, celle des peuples qui n'ont plus assez de force pour se tenir debout et qui se couchent pour mourir. Le destin d'une nation se gagne chaque jour contre les causes internes et externes de destruction."

 

Le gaullisme apparaît donc comme étant très essentiellement une interpellation de résistance à outrance, de subversion de la subversion et de l'affirmation d'une fidélité indéfiniment renouvelée aux principes de ses origines abyssales d'une civilisation, d'un ethos supratemporel, d'une suprahistoire polaire et impériale.

 

Et il ne faudra donc pas s'étonner du fait que, face aux Églises de Pierre et de Jean, une certaine mystique confidentielle propre au gaullisme - à un certain gaullisme, au "gaullisme de la fin" - ait choisi l’Église de Saint-André, ni que la fleur de chardon bleue, insigne de l’Écosse et de l’Église de Saint-Andrée, figure dans les armes de certaines organisations confidentielles de combat dans la mouvance immédiate du gaullisme, l’Écosse ayant été la "terre des grands refuges" des anciens Ordres Européens subversivement poussés hors de l'histoire par sa marche en avant, qui n'est en réalité que l'anti-histoire et ce qu'elle véhicule occultement, un combat perpétuel contre les puissances subversives de la démission et de la mort, de l'affirmation impérialiste et totalitaire du non-être.

 

Aussi vient-on d'essayer de dresser, ici, le relevé d'un certain nombre de stations d'interceptions de l' "autre face", de la face abyssale, suprahistorique et occulte du gaullisme et de certaines tentatives personnelles significatives du "concept absolu" Charles de Gaulle, qui, toutes, tendraient à prouver que, derrière le mouvement politique du gaullisme, il se tiendrait comme une pétition transcendantale, visant un au-delà de l'histoire, et la volonté conspirative d'établir, dans l'espace supratemporel de cet au-delà de l'histoire même, une projection impériale ultime de ce que celui-ci appelle à émerger révolutionnairement de son sein même, auroralement l'Imperium Ultimum, préliminaire politico-historique du Regnum Sanctum.

 

Mais que l'on ne se laisse pas abuser par ces démonstrations, fussent-elles entièrement convaincantes : il ne saurait s'agir, en tout état de cause, que d'autant de figures symboliques extérieures d'une réalité ultime des choses qui, elle, restera hors d'atteinte, insaisissable, parce que appartenant à un tout autre ordre des choses, celui-là même, précisément, qui sans cesse est appelé à constituer, dans les profondeurs, derrière la face visible du gaullisme sa face invisible, son identité inavouable et inavouée. La réalité politico-historioque n'est que le double reflété de la réalité transcendantale, un double chiffré, hors de la portée des attentions indues.

 

suite : Face au Grand Continent Eurasiatique précédent : Sur le grand tournant actuel du gaullisme

 

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