19/05/2015
Du Roi-revenant au Roi perdu (Gérard de Sède)
Gérard de Sède, La race fabuleuse, Du Roi-revenant au Roi perdu, pp. 92-97, aux éditions J'ai lu, collection L'aventure mystérieuse
Roi oublié puis nié, fait néant, Dagobert II est pourtant un roi dont l'assassinat ouvrait une suite incalculable de conséquences. S'il est mort sans descendance mâle, la branche ainée des Mérovingiens s'éteint et, avec elle, la légitimité austrasienne. Dans l'immédiat, l'Austrasie retombe sous le joug de la Neustrie sur laquelle règne la branche cadette. Mais par suite des imbroglios dus aux substitutions d'enfants, celle-ci est d'une légitimité plus que douteuse et du reste elle s'éteint à son tour dés 737 en la personne de Thierri IV. La réalité du pouvoir politique reste ou retombe alors entre les mains des maires du palais, mais sur toute l'étendue du territoire auquel correspondent aujourd'hui la France (moins la Bretagne et le Pays Basque), la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse et la majeure partie de l'Allemagne de l'Ouest, le trône, ce lieu géométrique de la Psyché collective, la place du Roi-Mage reste vide.
Certes, les candidats ne manquent pas. Le mieux placé, puisqu'il est à la fois duc en Austrasie et maire du palais en Neustrie, est Pépin le Bref, de la tribu des Francs d'Hasbain, fils de Charles Martel et petit-fils de Pépin de Herstal, l'instigateur de l'assassinat de Dagobert II. Mais ce qui lui manque, c'est le sang sacré des Mérovingiens, cet élément mystérieux qui fait les initiables à la royauté et sans lequel nul ne peut espérer soulever la ferveur du peuple. Ainsi que l'écrit Jean de Pange : "Quelque déchus que soient les derniers Mérovingiens, le prestige de leur sang est si grand qu'il leur assure de nombreux fidèles. Ainsi s'explique la difficulté que les maires du palais éprouvent à se faire reconnaître comme successeur de leurs maîtres (1)."
Par bonheur pour Pépin le Bref, les femmes mérovingiennes, si elles ne peuvent régner, peuvent aussi bien que les hommes transmettre ce sang sacré. Pépin prend donc soin d'épouser la Mérovingienne Bertrade au grand pied, se fait élire et oindre à la mode de ceux que sa famille a éliminés, "suivant l'usage des Francs (2)", "comme l'ordre l'exige de toute antiquité (3)". Du coup, il est fait roi mais il ne l'est pas. Aussi juge-t-il nécessaire de procéder à une innovation en faisant aussi oindre sa femme, car c'est bien en elle seule que réside la légitimité. Du moins, leur fils Charlemagne et, à sa suite, tous les Carolingiens pourront-ils se prévaloir du fameux sang.
Il n'en ira pas de même pour les Capétiens, Hugues Capet n'est ni Carolingiens, ni Autrasien, ni même Franc. La chronique de Richer nous apprend qu'il avait pour trisaïeul "un étranger venu de Germanie", un Saxon nommé Witichin, "homme d'extraction peu relevée", et que "ses vassaux n'aimaient pas lui obéir (4)".
Orn il est interdit au Francs, sous peine d'excommunication, de prendre leurs rois hors de la famille des Péin, héritière du sang mérovingien. C'est pourquoi Foulques, archevêque de Reims, refuse d'oindre Eudes, petit-fils de Witichin, alors qu'il existe un roi franc et carolingien, Charles le Simple. "Qu'arriverai-il, dit l’archevêque à ce dernier, si la mort vous atteignait à un moment où il y a tant de rois de race étrangère et encore plus d'usurpateurs du nom royal (1) ?" Paroles significatives d'un prélat austrasien bien convaincu que seule la royauté par le sang peut assurer la protection magique du sol et de ses habitants.
Il ne faudra pas moins d'un siècle de dépositions, de tentatives d'usurpation et de sacres de complaisance pour asseoir sur le trône Hugues Capet que Guizot appellera "un parvenu en harmonie avec une époque nouvelle".
Son élection irrégulière est, du reste, aussitôt contestée, notamment en Austrasie, par le prétendant carolingien Charles de Lorraine. Hugues Capet le fera mourir en prison mais les Capétiens, pour mettre fin à leur impopularité, ne verront pas d'autre moyen que de chercher à s'allier à ce qui peut rester du sang sacré. Ils n'y réussiront qu'au XIIe siècle, quand Philippe Auguste épouse Isabelle de Hainaut qui en apporte quelques gouttes. Du coup - fait hautement significatif - leur fils, Louis VIII, s'empresse de donner à son premier-né le nom de Dagobert.
Mais si la lignée de Dagobert II s'était continuée, si le sang mérovingien ne s'était pas tari, c'est tout le tableau de la légitimité qui serait à refaire. Certes, même dans ce cas, l'histoire dynastique de la France resterait ce qu'elle a été, mais elle pourrait être déchiffrée tout autrement que nous n'avons coutume de le faire. Car certains de ses épisodes, qui sont à la fois les plus importants et les plus obscurs, recevraient alors une lumière nouvelle, ainsi qu'il arrive toujours quand, derrière l'éclat de l'évènement, on devine une histoire parallèle, secrète, et les mains gantées d'ombre qui en tiennent les clefs.
On va voir qu'il ne s'agit pas là d'une pure spéculation. En effet, la stupéfiante occultation du personnage de Dagobert II ne fut ni le fruit du hasard ni un jeu gratuit. Elle n'aurait d'ailleurs eu aucune raison d'être si ce roi n'avait pas laissé de descendance. Au contraire, en vouant d'abord son nom a l'oubli, puis en niant son existence, on peut penser que c'est cette descendance que l'on voulait escamoter.
Il en est bien ainsi car, effectivement, Dagobert II eut un fils dont l’histoire mérite d'être contée. Laissons donc la parole à un chroniqueur de l'époque, Bruschius, et ouvrons son Livre des évêques de Strasbourg :
" Dagobert II épousa Mathilde, princesse de Saxe et ils eurent la consolation de voir la bénédiction du ciel tomber sur leur mariage par un assez grand nombre d'enfants. Le premier fut un fils qui leur causa beaucoup de joie par sa naissance, voyant en sa personne un héritier assuré pour la succession de l’État qu(ils recouvraient petit à petit . Ce prince naquit dans le château de d'Issembourg et y fut reçut-on de douleur d'un déplorable accident qui lui coûta la vie alors qu'on s'y attendait le moins. Ayant commencé à monter à cheval, on le conduisit un jour à la chasse dans la forêt d'Ebersheim pour le divertir, un sanglier d'une grosseur démesurée ayant été découvert, on le poursuivit avec chaleur et étant venu à la rencontre de ce prince, son cheval qui en prit l'épouvante l'emporta avec tant de violence que n'ayant pas assez de force pour l'arrêter ni pour se tenir ferme sur la selle, il en fut jeté à terre et foulé sous ses pieds en sorte qu'il en demeura tout brisé et ne vécut que jusqu'au lendemain."
Décidément, il ne faisait pas bon pour les Mérovingiens de s'attaquer à leur totem, ce sanglier dont ils portaient les soies sur le dos.
En tout cas, le fils unique de Dagobert II est mort tragiquement dans l'adolescence et la descendance est éteinte : l'escamotage était superflu.
Nullement, car voilà que ce fils ressuscite. Poursuivons la lecture de Bruschius :
" Le roi avait depuis quelque temps déjà engagé saint Argobaste à prendre le gouvernement de l'évêché de Strasbourg. Ce saint, qui était venu d'Aquitaine, avait une grande réputation de vertu. Le roi qui l'estimait comme un grand serviteur de Dieu l'envoya prier de venir le consoler en l'extrémité où la mort déplorable de son fils venait de le réduire. Le saint prélat y accourut et exhorta le roi et la reine d'élever leur confiance en Dieu qui peut rendre la vie aussi aisément qu'il la donne, et s'étant mis en prière proche le corps du petit prince pour demander à Dieu qu'il lui plût de vouloir y renvoyer l'âme qui l'avait peu auparavant vivifié, on s'aperçut que tout à coup l'enfant leva la tête comme s'il fût éveillé de quelque profond sommeil, et l'ayant pris entre ses bras il le rendit plein de vie au roi son père qui eut autant de joie le voyant ainsi ressuscité qu'il avait ressenti de douleur de sa mort."
Ce récit est plein de charme et Sigebert IV y apparaît, ainsi qu'avait été son père, comme un roi revenant. Mais quelque goût qu'on ait pour le merveilleux, les morts qui ressuscitent n'étaient pas morts. A la suite d'une chute de cheval, le jeune homme, probablement tombé sur la tête, est bientôt entré dans le coma et s'est éveillé quelques jours plus tard. Pour l'hagiographe de saint Argobaste, cela fait un miracle de plus à porter au compte de son héros.
Il est certain que Sigebert IV survécut à cet accident ; mais survécut-il à son père ? Un historien du XVIIIe siècle, Vincent, en est réduit aux conjectures quand il écrit : " Quant au prince Sigebert, fils de Dagobert, apparemment il mourut dans la même conjoncture que son père ou peu de temps après, car l'auteur qui a continué Frédégaire dit positivement que les rois, c'est-à-dire Dagobert et son fils, étaient morts en Austrasie (defunctis regibus) lorsque Pépin de Herstal prit les armes contre Ebroïn pour les venger. "
Somme toute, une mort aléatoire dont on ne peut fixer le moment . Il n'est pas croyable que le fils ait péri en même temps que le père, car nous possédons, nous l’avons vu, un récit extrêmement détaillé de l'assassinat de Dagobert II où rien de tel n'est mentionné. Quant au continuateur de Frédégaire sur lequel, avec bien de réticences, s'appuie Vincent, était un partisan des Pépin qui avait donc tout intérêt a laissé croire que la descendance de Dagobert II était éteinte (1). Le fait qu'il prête à Pépin de Herstal le rôle de vengeur d'un roi dont il avait, au contraire, ourdi l'assassinat prouve bien que son récit s'inscrit dans une entreprise d'intoxication politique.
Selon certains historiographes modernes, Sigebert IV aurait été soustrait par sa sœur sainte Irmine (2) aux griffes des Pépinides et aurait fait souche en Septimanie, c'est-à-dire dans le haut Languedoc. Malheureusement, les sources données par ces auteurs sont très difficilement vérifiables. L'apparition fugitive de Sigebert IV dans l'Histoire fait de lui un Roi Perdu. Si la lignée sacrée des Mérovingiens s'est perpétuée, c'est dans l'ombre.
Mais dans une ombre qui faisait peur...
(1) Jean de Pange : Le roi très chrétien, p. 131-132.
(2) Chronique de Moissac.
(3) Chronique de Frédégaire.
(4) Mon. Germ. Script. Tome III, p. 570.
***
(1) Chronique d'André de Marchiennes.
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(1) " Le remanieur de Frédégaire est un partisan des Pépinides ; il a peut-être supprimé certains passages. " (R. Barroux : Dagobert, p. 10.)
(2) Marié à Mathilde de Saxe puis à Gisèle, fille du comte de Razès Béra II, Dagobert II avait eu quatre filles : Ragnatrude, Adèle, Bathilde et sainte Irmine, abbesse d'Oeren.
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08/05/2015
L'Ukraine, un État par défaut ? (Georges Feltin-Tracol)
Georges Feltin-Tracol, Réflexions à l'Est, Si près de l'Ours, L'Ukraine, un État par défaut ?, p. 87, aux éditions Alexipharmaque
Les Français ignorent l'Ukraine alors que c'est le territoire le plus vaste d'Europe avec une superficie de 603 700 km² (Russie et Danemark avec sa possession du Groenland exclus) juste devant la France. On estime sa population à cinquante millions d'habitants. L'Hexagone inculte confond régulièrement l'Ukraine et la Russie du fait d'une histoire tumultueuse commune. Jacques Benoist-Méchin n'avait pas tord de la qualifier de "fantôme de l'Europe" (1) tant elle paraît précaire. Certains ne se privent pas de douter de sa réalité. En quoi alors l'Ukraine serait-elle un état par défaut, défaut se comprenant dans son acception mathématique.
La formation de l'espace ukrainien est relativement récente. Elle résulte de divers ajout territoriaux au cours du XXe siècle qui se caractérisent au final par un net déplacement vers l'Ouest et l'Europe centrale. Avant 1939, la République socialiste soviétique d'Ukraine (R.S.S.U) occupait à peu près les deux tiers de l'Ukraine actuelle. Grâce aux clauses secrètes du pacte germano-soviétique du 23 août 1939 liées à la répartition des zones d'influences de l'Europe orientale et au partage de la Pologne, l'U.R.S.S attribue dés octobre 1939 les palatinats polonais du Volhynie, Tarnapol, Stanislawow ainsi que la partie orientale de la région de Lemberg (Lvov) à la R.S.SU. Puis, après un ultimatum adressé à la Roumanie, le Kremlin obtient de Bucarest la Bucovine septentrionale et la Bessarabie. En 1945, la Tchécoslovaquie reconstituée cède à son allié soviétique la Ruthénie, subcarpatique annexé par la Hongrie six ans plus tôt. Enfin, le 25 février 1954, pour le trois centième anniversaire de la "réunion" de l'Ukraine à la Russie, la République socialiste fédérative soviétique de Russie offre à sa consœur ukrainienne la presqu'île de Crimée et son port stratégique de Sébastopol (2). (à suivre, Des fractures multiples...)
notes :
1 : Jacques Benoist-Méchin, Ukraine. Le fantôme de l'Europe, Monaco, Editions du Rocher - Vamonde, 1991.
2 : Pour plus de détails, cf. Yves Tissier, Dictionnaire de l'Europe. États d'hier et d'aujourd'hui de 1789 à nos jours, Paris, Vuibert 2008, pp. 538 à 544
(Lire l'article suivant Des fractures multiples)
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Des fractures multiples (Georges Feltin-Tracol)
Georges Feltin-Tracol,Réflexions à l'Est, Si près de l'Ours, L'Ukraine, un État par défaut ?, Des fractures multiples, pp. 88-90, aux éditions Alexipharmaque
Ces différentes adjonctions ne représentent pas en elles-mêmes des difficultés majeures dans l’organisation du territoire. Contrairement aux États sans façade littorale ou à la géographie particulière (Qu'on songe à l’étirement Nord - Sud du Chili et à son étroitesse Est - Ouest), l'Ukraine dispose d'un territoire massif et compact, ouvert sur les Mers Noire et d'Azov. En outre, elle bénéficie d'une capitale (Kiex/Kyiv) qui se trouve dans une position médiane quoique quelque peu excentrée vers le Nord et la frontière bélarussienne. Une certaine cohésion serait envisageable par une politique volontariste et audacieuse d'aménagement du territoire. Or rien n'est fait pour atténuer ses déséquilibres internes.
L'Ukraine est un jeune État qui ne dispose pas de la longue expérience administrative française, britannique ou allemande. Par bien des aspects, les troubles politiques et les dysfonctionnement étatiques qu'elle rencontre rappellent l'Italie unifiée entre 1851 et 1915. On décèle à la Rada (le Parlement ukrainien) la particularité parlementaire italienne avec le transformisme (les députés changent d'affiliation partisane au cours de leur législature), d'où une confusion gouvernementale certaine. Quant aux forces politiques, elles ne commencent vraiment que maintenant à s'organiser au sens allemand ou français du terme en s'appuyant sur des meneurs plus ou moins charismatiques (Bloc Timochenko...).
Les incertitudes inhérentes à un jeune État permettent aux négateurs du fait ukrainien d'avancer que l'Ukraine n'est qu'une part essentielle de la Russie. Pour soutenir cette thèse, ils ajoutent que c'est le berceau historique de l’identité russe avec la "Russie de Kiev" de Vladimir Beau-Soleil. Ils soutiennent que la langue ukrainienne n'est qu'un patois paysan et que l'Ukraine s’appelait du XVIIe siècle jusqu'aux débuts du XXe par "Nouvelle Russie" ou "Petite Russie". Or ces appellations sont contestables. La noblesse polonaise, puis les Autrichiens, qui dominent l'Ouest du pays, parlent d' "Ukraina" et ses habitants d' "Ukraincy". Mieux encore, le Normand Guillaume Le Vasseur de Beauplan tire en 1651 de son séjour dans ces contrées exotiques un ouvrage, Description d'Ukranie, qui sont plusieurs provinces du Royaume de Pologne (3), dans lequel il mentionne l'Ukraine sous les mots d' "Ukranie" et de "Russie" alors qu'il parle de la future Russie par sa dénomination d'alors, la Moscovie.
Par ailleurs, Anne-Marie Thiesse a fort bien démontré que l'identité nationale provient dans la plupart des peuples européens d'un travail d'érudits qui collectent des particularités paysannes dont les patois afin de les élever au rang de singularités nationales et populaires (4). en outre, parler de "Russie de Kiev" appartient au registre anachronique. Il est plus appropriés d'évoquer la " Rus' " ou la "Ruthénie de Kiev". Le peuple ukrainien émane de la même matrice slave orientale génératrice des Russes et des Bélarussiens avec, du fait de sa situation géographique et des influences politico-culturelles contradictoires (polonais, puis autrichiennes à l'Ouest ; russes à l'Est ; ottomanes au Sud...), des mentalités différentes.
La célèbre dichotomie entre l'Ouest ukrainien et l'Est russophone ne doit cependant pas cacher des phénomènes moins perceptibles de fragmentations régionales, surtout là où vivent des minorités ethniques. L'Ukraine en recense plusieurs.Outre les Ukrainiens majoritaires te les Russes, on comte des Bélarussiens, des Roumains, des Hongrois, des Juifs, des Arméniens et des Grecs,. Depuis l'indépendance de 1991, deux minorités ont manifesté une forte agitation qu'on pourrait la qualifier de séparatiste : les Ruthènes en Ruthénie subcarpatique et les Tatars de Crimée, longtemps déportés en Asie centrale et autorisés sous Gorbatchev à revenir dans la péninsule. Afin de contenir les revendications tatares, l'Ukraine a accepté que la Crimée devienne une république autonome. Les Ruthènes exigent, eux, une reconnaissance culturelle au moins équivalente à celle des Tatars, ce que leur dénient les autorités de Kyiv au nom de l'unité nationale. Par contrecoup, les Ruthènes bénéficient de l'appui de la Russie et des partis russophones.
Un autre facteur de division sous-jacente concerne l’officialisation du russe à côté, voire à la place de l'ukrainien. Ce débat témoigne de la vivacité de la question nationale ukrainienne, même si existent des russophones d'Ukraine orientale favorable à l' "ukrainisation" du pays... L'actuel ministre de l’Éducation, Dmytro Tabachnyk, dénie toute réalité à l'ukrainien et conduit une politique poussée de russification...
A ces fortes querelles culturelles et linguistiques se superposent des conflits d'ordre confessionnel. D'abord entre les Orthodoxes et les catholiques romains de rite byzantin (ce qu'on appelle assez péjorativement les Uniates). Persécuté sous l'Empire russe et au temps de l' U.R.S.S., l'uniatisme retrouve une audience certaine avec l'indépendance de l'Ukraine et chercher à regagner sa place centrale dans les bourgs de l'Ouest ukrainien, quitte à reprendre plus ou moins de force des locaux religieux confisqués naguère et attribués à un clergé orthodoxes qui ne goûte guère ces actions. Il lui arrive de s'y opposer énergiquement, d'où des rixes dans les villages. Les autorités orthodoxes et grecques-catholiques sont aussi victimes de l'activisme forcené des sectes protestantes évangélistes venues des États-Unis qui profitent des dissensions religieuses pour convertir à leur foi de pacotille de nombreux fidèles en désarroi spirituel.
Le fidèle orthodoxe a de quoi être désorienté puisqu'il doit composer avec trois obédiences orthodoxes : une Église ukrainienne rattachée au patriarcat de Moscou, donc à l’Église orthodoxe russe, et deux Églises orthodoxes autocéphales ukrainiennes, non reconnues par les autres Églises orthodoxes, dont une dite du patriarcat de Kyiv. (à suivre, La "Révolution Orange" et ses conséquences chaotiques)
Notes :
3 : Guillaume Le Vasseur de Beauplan, Description d'Ukranie, qui sont plusieurs provinces du Royaume de Pologne, Paris, l'Harmattan, coll. "Présence ukrainienne", introdcution et notes de Iaroslav Lebedynsky, 2002.
4 : Anne-Marie Thiesse, La construction des identités nationales. Europe XVIIIe - XIXe siècles, Paris, Le Seuil, coll. "L'univers historique", 1999.
(Lire l'article suivant La "Révolution Orange" et ses conséquences chaotiques ; précédent L'Ukraine, un État par défaut ?)
Représentation Général des plaines vides (Dans le langage courant, l'Ukraine) En collaboration avec les provinces voisines créé 1648 par Beauplan
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