09/04/2015
Jean Parvulesco "L'Ombre de l'Unique" (Lecture de Laurent James)
Jean Parvulesco sur les rapports entre Orient et Occident
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31/03/2015
Atlantide et Hyperborée
Jean Parvulesco, Le Sentier Perdu, pp. 32-34, aux éditions Alexipharmaque
Heinrich Harrer, en effet, vainqueur de la face nord de l'Eiger en juillet 1938, avait déclaré à ce moment-là : "Nous avons fait la face nord de l'Eiger pour parvenir, par dessus le sommet, jusqu'au Führer !" Il est également certain que, par la suite, il s'était fait admettre chez les SS, et que c'est en tant que SS qu'il avait alors pu partir, en 1939, pour le Tibet, dans le but avoué de vaincre Nanga Parbat, ce qui correspondait à ce moment-là à une sorte d'ambition collective allemande, à une véritable obsession nationale allemande (quatre autres expéditions allemandes avaient déjà échoué à cette tâche, Heinrich Harrer était convaincu que, lui, il allait l'emporter).
Or il vient même de se trouver - c'est, en l’occurrence, le cas précis de l'américain David Roberts - qui en sont finalement arrivés jusqu'à se demander si, derrière la couverture d'une expédition aux buts concernant exclusivement l'alpinisme de haute compétition, il ne se dissimulaient pas, à ce moment-là, pour Heinrich Harrer, d'autres missions inavouables, ultrasecrètes, appartenant à l'horizon occulte, souterrain, du nazisme, du "grand nazisme occultiste". Aussi trouvera-t-on, dans Le Monde en date du 23 Novembre 1997, sous la signature de Alain Giraudo, les lignes qui suivent : "Si Harrer ne dit pas toute la vérité sur ses liens avec les nazis, la dit-il à propos de son passage au Tibet ? Il est clair pour David Roberts que Himmler est intervenu pour que Harrer participe à l'expédition du Banga Parbat dont le chef SS était le commanditaire direct. Il l'avait été un an auparavant d'une mission "anthropologique" qui s'était infiltrée au Tibet et jusqu'à Lhassa. Les nazis, qui avaient fait le rapprochement entre la croix gammée (swastika) et un symbole bouddhiste, s'étaient persuadés que les Tibétains descendaient directement des aryens qui avaient trouvés refuge dans l'Himalaya au moment de l'effondrement de l'Atlantide. Bruno Berger, de sinistre mémoire pour sa collection de squelettes prélevés dans les camps, accompagnait le SS Ernst Schafer pour faire la démonstration "scientifique" de ce délire fantasmatique. David Roberts n'a pas établi la preuve que Harrer connaissait le but des travaux de Schafer et Berger mais il pense que Harrer ne pouvait pas en ignorer l'existence. D'autant que Schafer aurait établi en 1938 des relations avec un dignitaire tibétain dénommé Tsarong qui, en 1946, aurait facilité à Harrer et à son compagnon l'accès au Dalaï-lama. Vu sous cet angle, la fascination qu'exerçait le Tibet sur les deux fuyards prend néanmoins une autre signification."
Ces journalistes, dont l'humeur abjectement fouineuse ne trouve d'égal que dans leur profond analphabétisme, ignorent sans doute que les tenants actuels de la tradition occidentale - dont René Guénon et Julius Evola - sont tous d'accord pour reconnaître un antagonisme irréductible entre la civilisation de l'Atlantide et celle de l'Hyperborée, entre l'extrême Occident et l'extrême Nord. La civilisation de l'Atlantide était essentiellement magicienne, sombre et crépusculaire, lunaire, et avait suicidairement mis en jeu des formidables forces métagravitationnelles dont elle ne savait pas maîtriser - ou l'avait oublié - les hautes puissances spirituelles qui eussent pu justifier les maniements et garder le contrôle. Il est en même temps vrai que l'éthos doctrinal profond de la conscience magicienne du Tibet, sombre, hallucinée par le perpétuel combat contre les démons de l'invisible, qu'elle fût pré-bouddhique ou bien celle d'un bouddhisme transformé de l'intérieur, correspond assez à ce qu'avait dû être la vision du monde de l'Atlantide. Mais dans tous les cas le "grand nazisme occultiste" n'avait pas à s’intéresser à l'Atlantide, qu'il assimilait à la civilisation matérialiste et désacralisé d'outre-atlantique, à la face irrémédiablement décadente, finale, de l'Occident mais aux civilisations originelles de l'extrême Nord, aux souvenances immémoriales de la vision hyperboréenne du monde, limpides et solaires, héroïques, divines et divinisantes, fondées dans l'être et pourvoyeuse de liberté. Ce qui est une toute autre chose. Et l’intérêt du "grand nazisme occultiste" pour le Tibet était, lui aussi, tout autre que ne sauraient se le figurer ceux qui en parlent du dehors.
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11/03/2015
Retour à l'Inde éternelle (Jean Parvulesco)
Jean Parvulesco, Le Retour des Grands Temps, Retour à l'Inde éternelle, pp. 266-268 , aux éditions Guy Trédaniel
Les meilleurs esprits occidentaux se sont utilisés à discourir à perte de souffle, depuis le début du siècle, sur l'agonie de la civilisation européenne et de ses valeurs fondamentales en voie de désintégration, et irréversiblement il faut croire. A l'heure présente, la situation est devenue radicalement autre : la civilisation européenne n'est plus en agonie, elle a enfin été admise à rejoindre les ténèbres de la mort. Ainsi se fait-il que la tâche des ceux des nôtres qui, plongés dans la plus parfaite clandestinité ontologique, sont encore en état de se battre ou croient l'être ne sera en aucun cas plus celle d'empêcher qu'une culture tragiquement périclitée ne meure, mais de pourvoir opérativement aux rituels occultes de sa mise en résurrection. L'ombre inapaisée de la dernière civilisation occidentale est ainsi conviée à des retrouvailles suprêmes avec Orphée, dieu de ses origines, dieu du retour de la mort. Mais, tout comme Dionysos, Orphée ne nous vint-il pas, lui aussi, de l'Inde ? Très secrètement, et même très clandestinement, en des temps et par des voies que certains retrouvent aujourd'hui ? Hölderlin, dans ses plus hautes, dans ses plus grandioses hymnologies de la fin l'avait profondément compris. Et Heidegger aussi, dans la mesure ou il avait eu a renoncer à la philosophie, exercice décadent et frappé d’impuissance, porteur de signes singulièrement funestes, pour ne plus se donner, dans les années sommitales de sa vie, qu'à la seule instruction du chant final de la poésie allemande.
Pour ceux des nôtres qui détiennent encore les attributions voilées des anciennes confréries héroïques de combattants d'une civilisation s'engouffrant, comme une autre Atlantide, dans les ténèbres océaniques de son auto-anéantissement historique et culturel, le sursaut salvateur de l'Europe et du Grand Continent eurasiatique et le mouvement de leur retour apocalyptique à la vie se doivent de passer par le ressourcement aux souffles revivifiants et noirs de l'Inde actuelle. "Le retour de Kali sera terrible", dit Olivier Germain-Thomas. Inde actuelle derrière laquelle se cache le mystère vivant de l'Inde éternelle ou, si l'on veut, de l'Inde antérieur, mystère aurifère et rouge, mystère de sang et d'ensoleillement ontologique, mystère unique d'une souche de sang unique, d'une souche de sang royale et solaire, mystère original de la Surya-Yamça. En tant que dieu du retour du Grand Continent eurasiatique à l'Inde antérieure, Orphée nous est donc, aujourd'hui, un dieu noir, mais, noir, il ne le sera pas toujours. Aussi, en attendant que le jour revienne, ou que nous-mêmes nous puissions retrouver, en nous, l'ancienne ouverture du jour en nous qui s'est éteinte, nous allons devoir nous résigner à porter les armes endeuillées de l'Orphée noir, dieu du retour nocturne, tragiquement et secrètement funèbre, à l'Inde d'aujourd'hui, telle que l'Inde en est venue à être elle-même aujourd'hui, elle-même apparemment non-épargnée. Orphée, dieu de l'Inde noire, dieu de retour occidental à l'Inde par les chemins des ténèbres ultimes.
Or, et aussi déconcertant que cela puisse paraître, aujourd'hui, en France, la seule tentative majeure, opérativement signifiante, du retour à l'Inde, à l'Inde dans son être d'aujourd'hui, se trouve assurée par Olivier Germain-Thomas, et par ce qu'il est tenu, ainsi, de représenter, qu'il le sache déjà lui-même ou pas tout à fait encore. D'où le statut d’exceptionnelle importance qu'il me semble qu'il faille tenter d'imposer à son Retour à Bénarès, confession déchirante et station métasymbolique déjà en place du grand mouvement de reflux qui véhicule aujourd'hui le retour à demi-clandestin des plus avancés des nôtres vers la patrie de leur plus profonde, de leur plus occulte prédestination activiste. Retour ontologique vers une patrie préontologique, pénétration tragiquement subversive des tenants et des aboutissants de nos dernières et plus sombres impermanences crépusculaires vers ces hauts lieux d’identité transcendantale que recouvrent, en nous-mêmes et sur la Frontière Nord du monde et de l'anti-monde, de l'être et du non-être, les neiges himalayennes de notre antériorité la plus immaculée, et sans doute encore la plus virginalement intacte.
Olivier Germain-Thomas : Enfin la terrasse. Je regarde le soleil.
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