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19/12/2014

Une actualité en armes (Jean Parvulesco)

 

Jean Parvulesco, La confirmation boréale, Sur le grand tournant actuel du gaullisme, Une actualité en armes, pp. 256-258, aux éditions Alexipharmaque 

 

« Moi je dis qu'il faut faire l'Europe avec pour base un accord entre Français et Allemands. Une fois l'Europe faite sur ces bases, alors, on pourra se tourner vers la Russie. Alors, on pourra essayer , une bonne fois pour toutes, de faire l'Europe tout entière avec la Russie aussi, dut-elle changer son régime. Voilà le programme des vrais Européens. Voilà le mien. » En prenant ces positions tout à fait claires, et définitives, lors d'une conférence de presse en 1949, le Général de Gaulle avait, d'avance, tout dit : l'extrême actualité de son discours le prouve encore, cinquante ans après. Pour la première fois, la Russie y apparait comme un élément fondamental de l'Europe de l'après-guerre, de l'Europe grand-continentale,  « eurasiatique ». Or il est absolument évident que, à l'heure présente, c'est bien la Russie qui propose et engage l'alternative finale à la mise en place de la plus Grande Europe, en train d'être révolutionnairement mobilisée sur l'axe transcontinental Paris-Berlin-Moscou.

 

Exprimée, par Jacques Chirac, fin août 2002, lors de la conférence des ambassadeurs de France à Paris, la décision de se saisir du 40ème anniversaire - en janvier 2003 - du « Traité de l’Élysée » de Gaulle-Adenauer pour mettre en place un Pacte Refondateur franco-allemand et une relance en force de l'Europe grand-continentale incluant, fondamentalement, la participation de la Russie, participation dont Jacques Chirac avait renouvelé les bases lors de son voyage, en juillet 2002, en Crimée, pour y rencontrer Vladimir Poutine, fait que, à partir de maintenant, l'Europe grand-continentale est, en principe, déjà, chose faite : nous venons de gagner la partie. Même si on ne le sait pas encore, le processus de la mise en œuvre de la plus Grande Europe continentale se trouve, à l'heure actuelle, irrévocablement enclenché.

 

Ainsi, cinquante ans après la déclaration du Général de Gaulle concernant l'avenir de la plus Grande Europe continentale franco-allemande s'appuyant sur la Russie, le « grand dessein » fondamental du gaullisme, se trouve pratiquement réalisé, ou en voie de l'être.

 

Or la nouvelle donne européenne décisive provenant, donc, de l'émergence politico-historique de la « Nouvelle Russie » de Vladimir Poutine, formidable bloc continental engageant le heartland géopolitique du « Grand Continent » eurasiatique dans le sens de son rétablissement impérial-révolutionnaire final, fait aujourd'hui de l'Europe la forteresse politico-stratégique d'horizon suprahistorique et eschatologique préfigurant l'Imperium Ultimum, l'avènement du Regnum salvateur de l'histoire de la fin et de l'au-delà de la fin de l'histoire.

 

Le « grand gaullisme », le « gaullisme de la fin », apparaît ainsi comme l'agent opérationnel d'une certaine fin apocalyptique de l'histoire, et du passage vers les temps autres, vers les « temps secrets », « inprépensables », de la transhistoire finale dans sa marche eschatologique à contre-courant.

 

Si c'est bien l'axe transcontinental Paris-Berlin-Moscou qui, désormais, sera appelé à faire la « grande histoire », c'est en France qu'à l'heure actuelle se situe l'épicentre opérationnel de celle-ci : en anéantissant la conspiration trotskiste subversivement installée au pouvoir sous ses dissimulation socialistes, la droite française s'est donnée aujourd'hui une majorité totale, incarnée, au niveau politico-administratif, par le « parti unique » de l' « Union pour la Majorité Présidentielle » (UMP), « parti unique » au sein duquel l'appareil gaulliste pourra à présent manœuvrer le courant porteur de la stratégie de pointe qui entraînera le reste. C'est désormais à l'intérieur de l'UMP que le gaullisme installera son « camp retranché » politico-stratégique, c'est depuis l'intérieur de l'UMP que le gaullisme va devoir agir. Cette situation, peut-on le dire, était prévue depuis longtemps.

 

Déjà, dans Les fondements géopolitiques du grand gaullisme, j'écrivais : « Le pouvoir - où ne fût-ce qu'une certaine situation de pouvoir - représente la condition même d'une clandestinité supérieure : la véritable clandestinité n'est pas du tout celle du combat contre le pouvoir en place, mais la clandestinité poursuivie, précisément, à travers le pouvoir en place. Loin de cesser ses menées avec son arrivée au pouvoir, la grande clandestinité ne fait alors que changer de registre, en se donnant sur place les moyens de sa continuation décisive, engagée sur le parcours de son achèvement total. Hors du pouvoir, toute clandestinité est subalterne. » Et ensuite : « Une conspiration aux destinées ultimes ne visera le pouvoir politique, ou gouvernemental, qu'au titre conspirationnel d'une nouvelle étape de franchie sur la montée de sa propre spirale conspirationnelle. Une fois au pouvoir, ce que l'on peut appeler une conspiration ultime se dédouble pour conspirer contre elle-même, contre la partie d'elle-même chargée de faire semblant de céder aux assujettissements du pouvoir. »

 

Tel est le grand tournant actuel du gaullisme qui, en fin de course et au moment de sa nouvelle montée au pouvoir, aussi inattendue que totale, doit à nouveau rentrer dans l'ombre, s'inventer une nouvelle forme de clandestinité stratégique, tout comme à ses premiers débuts, au temps de la résistance à l'occupation allemande de la France. Mais n'est-ce pas contre une nouvelle occupation étrangère que le portent, aujourd'hui encore, ses nouveaux combats ? Le combat pour la libération continentale n'est-il pas essentiellement le même que l'ancien combat pour la libération nationale ? Ces interrogations sont peut-être tragiques, mais la situation à laquelle le gaullisme doit aujourd'hui faire face, n'est-elle pas une situation de tragédie ? Le gaullisme, aujourd'hui, se trouve souterrainement engagé à la pointe des combats décisifs pour la plus Grande Europe, et c'est là que s'accomplit son suprême destin, le destin secret d'une certaine « France secrète ». précédent : Le « génie du renouveau »

 

 

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18/12/2014

Le « génie du renouveau » (Jean Parvulesco)

 

Jean Parvulesco, La confirmation boréale, Sur le grand tournant actuel du gaullisme, Le « génie du renouveau », pp. 252-256, aux éditions Alexipharmaque

 

Cependant, trente ans après le départ du général de Gaulle du pouvoir, que reste-t-il encore de son grand « dessein secret », de son projet impérial européen, de sa vision suprahistorique du Grand Continent Eurasiatique et de la mission transcendantale de la France ? Où en est-elle, aujourd'hui, l’œuvre révolutionnaire, salvatrice, partie pour changer le visage final de l'histoire actuelle du monde, qu'avait entrepris de mener à bout le « concept absolu » Charles de Gaulle ? Convenons-en : de tout cela, apparemment, il n'en reste plus rien. Tout s'est défait, tout a été dévasté, réduit au néant, jusqu'au souvenir même de ce qui a été dévasté, de ce qui a failli être, et qui n'est plus, à l'heure présente, que mensonge et vile imposture.

 

Sur la ligne de passage du troisième millénaire, la France se trouve en état de faillite frauduleuse politique totale, irrémédiable, et l'Europe semble s'être totalement résignée à ne plus être qu'une charogne politique à la traîne de la con,spiration subversive du mondialisme régi par ce que le président Bill Clinton appelait, récemment, la  « Superpuissance Planétaire » des États-Unis.

 

Car c'est un fait : d'une manière extrêmement suspecte, aussi abrupte que sournoise, équivoque et sale, dans l'espace d'à peine un an, la France a politiquement cessé d'exister, et cela même d'un point de vue démocratique. En effet, l'un après l'autre, les partis politiques français dans leur ensemble, se sont mis en état d'autodestitution. Ainsi, le Front National, la droite libérale et le RPR, le Parti Socialiste et jusqu'au Parti Communiste lui-même se sont successivement trouvés dans l'obligation scabreuse d'avoir à faire face à des difficultés d'ordre intérieur  – et y faire face en catastrophe qui les ont pratiquement mis hors jeu, paralysés, rendus inaptes à tout travail politique suivi, cohérent, réellement significatif. Entre autres, très opportunément sorties par des juges acharnés – très acharnés – à la tâche, les « affaires » ont fait des dégâts irrémédiables dans tous les camps politiques en présence. A se demander même si cela ne correspondait à un plan secrètement concerté.

 

En fait, tout recours, tout projet, initiative ou essai de dégagement et de salut en provenance du dispositif politique actuellement en place, dans son ensemble, se trouve d'avance frappé de nullité, prédisposé à l'échec immédiat, voué à se retourner aussitôt contre sa propre destination, ne pouvant plus rien faire d'autre qu'intensifier encore le désastre. A l'heure présente, il n'y a plus en France un seul projet politique qui tienne vraiment, l'horizon historique de la France débouche sur un vaste désert cendreux plongé dans les ténèbres : la spirale négative de la catastrophe qui s'était mise en branle avec le départ du général de Gaulle du pouvoir vient d'atteindre, de sombre descente en descente encore plus sombre, le niveau de son ultime disqualification, qui est absolument sans retour. Malgré certaines apparences qui risquent de pouvoir nourrir, d'ailleurs pour peu de temps encore, l'illusion  fallacieuse et inepte d'une sorte de continuité fictionnelle qu'entretiendrait la seule force des choses, tout est déjà fini, et c'est déjà la conclusion abrupte sur le vide d'une sorte d'arrêt de l'histoire, de suspension de l'histoire, où il y a plus rien à espérer, rien à tenter d'entreprendre, où plus rien ne saurait faire obstacle à la marche de la France à l’abîme.

 

La longue agonie française de ces trente dernières années d'impuissance, de cauchemar et de honte a pris fin, ce sont maintenant les ténèbres de la mort qui commencent, où il faut que l'on se déprenne de tout. De toute évidence, nous en sommes là, et qu'on veuille le nier ne sert plus à rien, à rien du tout.

 

Mais ce terrible passage à vide n'est-il pas en même temps un seuil probatoire tragique tout à fait final, l'étape ontologiquement nécessaire à une nouvelle remontée de l'être à venir, à un autre recommencement historique de la prédestination originelle, abyssale, de la France, d' « une certaine idée de la France » ?

 

Aussi nous faudra-t-il citer, ici, ces lignes si extraordinairement prémonitoire des Mémoires (III) du général de Gaulle écrivant, inspiré sans doute par ce que lui même appelait le « génie du renouveau » : « Le destin est donc scellé ? Est-ce, pour toujours, la victoire de la mort ? Non ! Déjà, sous mon sol inerte, un sourd travail s'accomplit. Immobile au fond des ténèbres, je pressens le merveilleux de la lumière et de la vie. »

 

Ainsi, désormais, seul l'inconcevable commande. Et l'inconcevable, en l’occurrence, étant l'action révolutionnaire totale du petit nombre de ceux qui ayant réussi a franchir eux-mêmes, pour leur propre compte, clandestinement, la ligne de passage entre l'être et le non-être, se trouvent déjà en état d'assumer la tâche de veiller sur un nouveau retour à l'être, d'un nouveau recommencement révolutionnaire de l'histoire française de l'Europe, de la plus Grande Europe, recommencement se situant déjà au-delà de la fin de l'histoire actuelle de la France. Toute la question est là.

 

Il y a une dizaine d'années, j'étais moi-même déjà amené à écrire : « Le gaullisme, aujourd'hui, doit-il s'engouffrer, définitivement, dans les souterrains nocturnes de l'histoire ou, au contraire, doit-il être repris, sauvé de lui-même, continué ? Doit-il être remplacé par autre chose ? »

 

Des nouvelles élites, des groupes occultes de combattants prédestinés, suréveillés, des « rescapés du feu se trouvent-ils ainsi appelés à monter subversivement à l'assaut des positions actuelles ou plutôt des non-positions du pouvoir politique en France, revivifier au prix de leur vie le sillon ardent qu'aura laissé derrière lui le « gaullisme de la fin », le dernier « grand gaullisme », le « gaullisme transcendantal » instauré dans l'ombre par le général de Gaulle sur la marge la plus périclitée de l'histoire française en marche vers son plus mystérieux destin final, de son destin d'au-delà de la fin ?

 

Et, en même temps, depuis les gouffres obscurs de l'indifférencié originel, un autre « concept absolu » de la plus grande histoire française s'apprête-t-il à émerger, au-delà de notre morte espérance, inconvenablement, à l'éclatante lumière du jour ?

 

Il y a une dizaine d'années encore, j'écrivais aussi, et c'était peut-être pour le moment actuel : « Provisoirement plongée dans le sommeil dogmatique d'un auto-obscurcissement politique et historique représentant le plus haut degré d'une stratégie de refus, inconsciente, de recul devant le non-destin que tente de lui faire accepter démocratiquement, la France d'aujourd'hui attend dans les ténèbres.

 

Mais, entre la démocratie et la survie historique de la France, comment ne pas choisir la France ?

 

Et qu'attend-elle, la France ? Quelqu'un, et ce quelqu'un, certains le savent, ne peut absolument pas ne pas être déjà là, dans l'ombre. Se cachera-t-il pour bien longtemps encore, ce quelqu'un ? Plus pour longtemps, non, plus pour longtemps. »

 

Or quoi de plus actuel, aujourd'hui, pour nous autres, que cette attente prophétique, dont le secret est celui d'un vœu révolutionnaire à la fois final et total ?

 

Mais, pour le moment, il suffit que dans le vide foudroyé de l'actuelle extinction de l'histoire française le problème des doctrines agissantes d'un certain gaullisme, du « gaullisme de la fin », se trouve posé à nouveau, en toute clarté, tragiquement, pour que quelque chose en vienne à en revivre, pour que le « génie du renouveau » puisse se manifester encore une fois, à l'heure prévue.

 

De toutes façons, le gaullisme ne peut en aucun cas être un parti politique : ayant vocation de rassembler, d'avoir, pour but, le tout, le gaullisme ne saurait s'engager à représenter seule une partie de la nation, au contraire, il doit en intégrer, à la limite, la totalité de ses courants intérieurs, depuis le Front National jusqu'au Parti Communiste.

 

Car il faut se le rappeler toujours : la France n'est pas une nation parmi d'autres, mais une conspiration suprahistorique, conçue, à ses origines, comme l'instrument politico-militaire d'une mission transcendantal, en défense de la Foi et de la civilisation émanant de cette Foi, son temps historiquement propre n'étant pas tout à fait celui de l'histoire, elle-même, mais la temporalité parousiale de l'après histoire, la temporalité intérieure du Saint Royaume d'au-delà de l'histoire, du Regnum Sanctum

 

C'est très exactement dans cette perspective qu'il faut situer le mouvement gaulliste, qui doit être, qui sera, jusqu'à la fin, ce qu'il a été à ses origines, le Rassemblement du Peuple Français dans son entier, la projection immédiatement politique de l'être abyssal de la France et de la prédestination transcendantale secrète de celle-ci. Et c'est ce dont il faut tenir fondamentalement compte lors de la future réorganisation d'un nouveau mouvement gaulliste révolutionnaire conforme à la ligne de son destin propre, qui concerne un certain nombre de missions à accomplir à la fois dans le visible et dans l'invisible, où il lui faudra faire face à ce qu'il est appelé la « guerre occulte ». Car le mouvement gaulliste comportera, toujours, une dimension mystique, une vocation dirigée vers la face secrète de l'histoire en marche. Ainsi que la France elle-même, avec laquelle il s'identifie ontologiquement.

 

Si tout rentre à nouveau dans la zone de l'attention suprême, ainsi qu'on peut désormais le penser, les groupes d'action politique spéciale dont la tâche sera celle de se porter à l'assaut des positions politiques du futur grand renversement final qu'impliqué toute tentative de renouveau en profondeur de l'actuelle histoire française, devront donc agir au double niveau, à la fois immédiatement politique et d'ouverture transcendantale, qui seul est porteur de la charge révolutionnaire capable de forcer le passage vers un nouveau recommencement. Vers la liberté recouverte.

 

Des groupes d'action politique spéciale qui amèneront avec eux le retour des Grands Temps. suite : Une actualité en armes précédent : Le gaullisme, une doctrine du déchiffrement

 

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15/12/2014

Le gaullisme, une doctrine du déchiffrement (Jean Parvulesco)

 

Jean Parvulesco, La confirmation boréale, Sur le grand tournant actuel du gaullisme, « Les desseins du prince ne sont bien connus que par l'exécution », pp. 248-252, aux éditions Alexipharmaque

 

Avec des moyens somme toute dérisoire comparés à ceux dont disposaient ses adversaires, l’aventure politico-historique du gaullisme a été une entreprise essentiellement désespérée, poursuivant inlassablement son opposition acharnée à la double conspiration anti-européenne de dimension planétaires et de profondeur suprahistorique constituée par les États-Unis et l'URSS. Et alors qu'il était inconcevable qu'il puisse réussir, étroitement bloqué comme il se trouvait par l’étau fatidique de la perpétuation de fait des accords de Yalta, le général de Gaulle avait quand même fini par l'emporter sur toute la ligne.

 

Avec cette décision résolue, inconditionnelle – l'Entschlossenheit heideggérien – de la foi visionnaire, ontologiquement engagée, le général de Gaulle, dans une solitude glaciale, a néanmoins poursuivit sans relâche, d'échec en échec plutôt que de réussite en réussite, l’œuvre de redressement qu'il avait faite sienne, la mission secrète qui lui avait été confiée par la Providence, à savoir, au-delà de la décolonisation et de ses arrières-batailles, celle de ramener la France à son statut antérieur de superpuissance politique planétaire, afin qu'il en fasse l'instrument suractivé de la mise en place de l’unité impériale européenne grand-continentale. Car, derrière le redressement de la France, le générale de Gaulle n'a pas un seul instant cessé de viser le redressement suprahistorique final de la plus Grande Europe.

 

Aussi, à regarder avec une attention entendue ce qu'auront été les cinq grandes échecs du gaullisme au pouvoir, l'image en creux se précisera-t-elle mieux, devant nous, des arrière-pensées du « grand dessein » politico-historique révolutionnaire que nourrissait confidentiellement le général de Gaulle tout le long de ses batailles politiques immédiates. La grille de déchiffrement de ces cinq échecs est décisive.

 

1) En premier lieu, il faut considérer l'échec de ce qu'aurait dû être l'intégration politique totale franco-allemande, la constitution – la reconstitution – immédiate, de fait, d'un Pôle Carolingien, par l'union de la France et de l'Allemagne, les deux pays ne faisant plus qu'un, avec un seul gouvernement et une seule identité politico-administrative, afin que l'on puisse ainsi mettre en œuvre l'intégration politique accélérée de l'ensemble de l'Europe de l'Ouest. A juste titre le général de Gaulle avait-il donc défini l'union politique franco-allemande comme une Révolution Mondiale, eine Totale Weltrevolution.

 

On sait que le chancelier Konrad Adenauer avait été entièrement gagné à ce projet lors des trois jours qu'il avait passé à Colombey les Deux Églises, hôte personnel du général de Gaulle, mais que la décision finale a échouée à causes des déficiences de l'appareil politique ouest-allemand gangrené par les séquelles démocratiques de l'occupation, complètement tenu comme celui-ci se trouvait par les États-Unis, qui s'y opposaient farouchement. On en subit jusqu'à présent, et de quelle dramatique manière encore, les conséquences de ce premier grand échec gaulliste, qui fut aussi un échec terrible pour l'ensemble du continent européen, notre échec fondamental.

 

2) Il y eut ensuite l'issue malheureuse de la tentative de libération du Québec, où le général de Gaulle avait essayé d'installer une tête de pont politico-stratégique européenne, base d'une future grande politique d'intervention européenne au cœur même de l'espace continental des États-Unis, antécédents ainsi, prophétiquement, sur l'actuelle opération d'investissement supracontinentale des États-Unis qui, à travers leur intervention politico-militaire dans le Sud-est européen, en Bosnie et au Kossovo, viennent établir, à leur tour, en inversant la continent européen. Tête de pont à partir de laquelle les États-Unis comptent entamer le processus sur le terrain de leur prochaine entreprise d’assujettissement politique de l'ensemble de l'Europe – de l'Ouest et de l'Est – et cela surtout pour empêcher que la Russie ne puisse y pourvoir son rôle suprahistorique décisif par l'intermédiaire de l'axe transcontinental Paris-Berlin-Moscou, qui constitue, aujourd'hui, le principal soucis géopolitique de Washington. Avec le ratage de la libération du Québec, la géopolitique gaulliste d'attaque s'est vue interdire l'ouverture planétaire décisive de son « grand dessein  » confidentiel. Deuxième coup de barre après l'échec de l'intégration politique totale de la France et de l'Allemagne, le ratage de la libération du Québec avait en fait sonné le glas de l'entreprise géopolitique impériale de la France gaulliste, en arrêtant brutalement sa marche en avant révolutionnaire.

 

3) Le troisième grand échec du général de Gaulle apparaît comme avoir été celui de sa doctrine de la participation, derrière laquelle se tenait sa volonté d'une rupture, d'un renversement révolutionnaire de fond, à la fois ultime et total, des structures capitalistes en place, rétrogrades et subversives, tenues par en dessous par la conspiration mondialiste et apatride permanente. La doctrine gaulliste de la participation s'utilisant à installer un régime social révolutionnaire , issu d'un pacte féodal de type nouveau et visant la mise en état d'une nouvelle féodalité impériale grand-européenne où la lutte de classe et jusqu'à la notion de propriété elle-même se trouvaient dépassés par la nouvelle réalité révolutionnaire d'une identité impériale autre, par un autre commencement impérial de la société changée dans ses profondeurs, transfigurée. Ce sont les propres défaillances de l'appareil d’État gaulliste lui-même qui avaient permis la disqualification sur le terrain de la doctrine de la participation, et en premier lieu l'opposition sournoise et décidée, l'action subversive en profondeur de George Pompidou, l'homme de l'emprise capitaliste de fait et de la Banque Rotschild, l'inertie administrative et le sabotage politique dans l'ombre l'ayant finalement emporté sur la volonté révolutionnaire du général de Gaulle, que soutenaient néanmoins dans son combat des hommes comme François Ferroux et René Capitant, héros de l'entreprise de libération sociale révolutionnaire de la France et de l'Europe, aujourd'hui plus ou moins oubliés, mais dont l'heure reviendra.

 

4) Mai 1968, enfin : le général de Gaulle saura finalement faire face, mais, un an plus tard, la vague de fond déclenchée, en mai 1968, par les services spéciaux de Washington et les structures clandestines de l'intérieur et de l’extérieur de la France dans les ens de son autodestitution, l'emportera quand même, et ce sera, à terme, la fin du gaullisme. L’extraordinaire conspiration de mai 1968 avait été rendue possible, avant tout, par la faillite totale des services de renseignement politico-stratégiques du régime gaulliste en place, qui s'étaient très à dessein laissés empêcher de prévoir ce qui était en train de se manigancer souterrainement, ainsi que par l"inconcevable trahison politique concertée et l'ineptie foncière de ses propres structures politico-adminstratives d’État, inadéquates, dépassés, nocives, et sans doute, finalement, aussi, complices.

 

5) Et vint, en 1969, le départ soi-disant volontaire du général de Gaulle de la direction des affaires. En fait, au-delà du double prétexte du referendum fatal – d'une part, la liquidation de l'intolérable contentieux du Sénat, abcès de fixation, centrale diversionniste de sabotage et de trahison permanente de la ligne gaulliste du régime et, d'autre part part, le début de processus de fédéralisation intérieure de la France libérant ses régions du carcan jacobin, préliminaire et en quelque sorte répétition générale de ce qu'allait devoir être la Grande Europe impériale des régions – il y avait, dans le boutoir référendaire que s'était imposé le général de Gaulle, la nécessité d'une réaffirmation abyssale de la volonté nationale de le suivre et de le soutenir sans faille avant le grand saute n avant par dessus la ligne de rupture intérieure de l'histoire finale de la France, que l' « homme des tempêtes » s'était enfin formellement décidé d'imposer à la France, qu'il voulait abruptement engager dans l'aventure révolutionnaire totale dont il portait en lui la tragique exigence depuis déjà la fin de la dernière guerre. Sur un dernier coup du destin, il avait, comme il en avait l'habitude, joué le tout pour le tout, et tout perdu d'un seul coup. 

 

On sait néanmoins que l'échec du referendum – et dont le départ du pouvoir du général de Gaulle – avait été le résultat – encore et toujours – de la trahison politique de sa propre garde rapprochée, Gerges Pompidou ayant encore une fois joué contre lui, ainsi que Valéry Giscard d'Estaing, la droite réactionnaire, capitaliste et versatile, étant ainsi parvenue à faire écarn entre la décision révolutionnaire du général de Gaulle et l'attitude à son égard de la nation induite en erreur, égarée sans son choix, éberluée et comme menée hypnotiquement à l'abattoir de l'histoire, sans recours.

 

De la présente analyse donc du parcours suivi par la gaullisme au pouvoir, il se dégage, y inclus – et peut être même surtout – de la série révélatrice de ses échecs – perpétrés, tous, ces échecs, de plus en plus fatidiques, exclusivement en termes de haute trahison, ce qui ne laisse pas, à ce qu'il me semble, d'être hautement, très hautement significatif l'évidence qu'une conscience, qu'une volonté, qu'une prédestination d'une envergure littéralement suprahistorique avait toujours conduit la marche de Charles de Gaulle vers son objectif transcendantal secret, à savoir la mise en place d'un dispositif politico-historique révolutionnaire en téta de pouvoir installer à terme cette fédération impériale grand-continentale représentant la première ouverture vers le mystère final du Regnum Sanctum. Depuis le début jusqu'à la fin ses pas ont été conduits, depuis le début jusqu'à la fin il a été mené depuis l'invisible. Le parcours du général de Gaulle a été fondamentalement médiumique. suite : Le « génie du renouveau » précédent : « Les desseins du prince ne sont bien connus que par l'exécution »

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