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07/12/2014

La démocratie, sacrée ou laïque ? (5)

 

 

Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique : La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna

 

LES SIGNES ARCHAÏQUES DE LA DÉMOCRATIE DES TEMPS MODERNES: LES SUFFRAGETTES ET HITLER

 

C'est pourquoi dans l'histoire européenne moderne, nous rencontrons ici ou là de marques du principe archaïque. La démocratie elle-même devient quelque chose de sacré. Essayez seulement lors de conversations avec un Européen ou un Américain contemporain moyen de douter de la démocratie et vous verrez ce qui se passera. Vous deviendrez un « exclu », un « non-citoyen », un « idiotes ». Et aujourd'hui, cela peut paraître à beaucoup étrange, mais les femmes dans la société occidentale ont obtenu le droit de vote seulement trois siècles après l'introduction des procédures démocratiques en Europe ; déjà à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle le mouvement des « suffragettes » (du français suffrage, vote) exigeait que l'on permette aux femmes européennes de voter à égalité avec les hommes. Un peu plus de cent ans plus tard, dans la démocratie américanise, le principe racial était toujours d'actualité et les habitants indigènes de l'Amérique, les Indiens, ainsi que les esclaves importés d'Afrique, ne possédaient que des droits limités, tandis qu'un suffrage censitaire (liée à la possession d'une certaine quantité de richesse) limitait le cercles d'élus autorisés participer à la démocratie. Le système politique américain était complété par l »activité intense des loges maçonniques et d'autres sociétés secrètes qui garantissaient et garantissent encore le contenu sacré de la démocratie américaine. Et enfin, exemple déjà paradoxale, l'avènement de l'Allemagne nazie. Comment est-il possible que dans un pays développé, contemporain, civilisé et éclairé de l'Europe du XXe siècle, le siècle de la civilisation et du progrès, s'appuyant sur des procédures absolument démocratiques avec l'assentiment général, soit arrivé au pouvoir un individu qui a restauré en Allemagne non pas même un esprit médiéval mais encore plus archaïque avec des rituels de masse, des recherches pseudo-scientifiques irrationnelles et une impitoyable ségrégation raciale ? Et ici à nouveau, comme dans toutes les démocraties, on constate pleinement le principe de « séparation », selon lequel certains étaient autorisés à participer à la pratique extatique, alors que d'autres étaient totalement exclus.



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The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center

La démocratie, sacrée ou laïque ? (4)

 

Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique : La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna

 

LE PARADOXE DE LA RENAISSANCE : «  EN AVANT VERS L'ANCIEN »

 

Comment dans ses conditions comprendre le fait qu'à l'Époque moderne, l'époque des Lumières et du progrès, l'Europe se soit tournée précisément vers la démocratie dont les traces s'étaient perdues dans les sociétés occidentales plus de deux mille ans auparavant ? En effet, entre l'antique démocratie athénienne et les républiques parlementaires européennes contemporaines, de longs siècles d'histoire de l'Occident avaient été marqués par des systèmes politiques monarchies et aristocratiques. La réponse trouve son origine dans l'époque de la Renaissance.

 

Cette période porte la responsabilité de nombreux paradoxes qui se sont manifestés seulement beaucoup plus tard. A l'époque de la Renaissance le génie européen a décidé de rejeter les normes rationnelles de la scolastique et de libérer la dimension humaine. Habituellement, ce fait est considéré comme un pas en avant. Bien peu prêtent attention au fait que les acteurs de la Renaissance eux-mêmes avaient justement pris comme modèle l'homme antique de Platon et avaient rejeté les dogmes du catholicisme non pas pour une scientificité laïque qui n'existait pas encore, mais pour des enseignements magiques, alchimiques, pour le mythique et le mystique. En d'autres termes, ils appelaient à une pratique archaïque, à une pratique extatique du ressenti de la sacralité totale du monde. Tant Marcel Ficin, que Giordano Bruno, ou encore Michel-Ange étaient des adeptes convaincus du platonisme, de la Grèce antique, des chercheurs des mystères égyptiens, et des connaisseurs de la kabbale. Leur intérêt pour la démocratie en Europe vient de cet héritage. La démocratie politique a été retrouvée en même temps que Plotin et Hermés Trismégiste, en même temps que la pierre philosophale et que les dieux qui, semble-t-il, avaient depuis longtemps quitté le monde.

 

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The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center

La démocratie, sacrée ou laïque ? (3)

 

Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique : La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna

 

LA MODERNISATION POLITIQUE : DE LA DÉMOCRATIE A LA TYRANNIE

 

Dans l'histoire de l'Occident ainsi que dans celle d'un certain nombre d'autres civilisations, la modernisation du système politique est passée par le refus de la démocratie, le plus souvent au bénéfice de l'aristocratie et de la monarchie. Et même si dans ce cas le caractère sacré du pouvoir était conservé, le principe rationnel individuel devenait de plus en plus visible. Les décisions politiques étaient prises le plus souvent par des personnalités ou encore des personnalités distinctes et de ce fait comportaient un caractère de plus en plus rationnel et purement humain. En s'éloignant de la démocratie archaïque, la civilisation fuyait le voisinage des dieux du monde où l'humain et le divin sont indissolublement liés. C'est pourquoi Aristote écrivait que « la démocratie donne naissance à la tyrannie ». La tyrannie remplace la démocratie en tant que forme d'organisation politique plus contemporaine où pour la première fois se manifeste très clairement un individu distinct, dans notre cas le tyran. Dans ce processus, « le divin » s'humanise.

 

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The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center