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07/12/2014

Le Projet "Empire" III (Alexandre Douguine)

 

Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique - La Russie et les idées politiques du XXIème siècle, Chapitre X Le projet "Empire" - L'empire des néoconservateurs (Benevolent Empire), pp. 211-213, aux éditions Ars Magna

 

L'empire des néoconservateurs (Benevolent Empire)

 

La thèse de l'actualité du terme "empire" pour la compréhension des réalités du monde contemporain se voit confirmée par un renouveau d’intérêt pour ce concept dans la politologie mondiale du XXIème siècle. A partir de 2002, la presse américaine dans son ensemble a commencé à employer ce terme, appliqué au rôle que les États-Unis doivent jouer envers le reste du monde dans ce nouveau siècle (et peut-être dans ce nouveau millénaire). Un débat sur l'empire a largement agité la société américaine. Comme toujours dans ce genre de dispute, ce concept était compris de façon différente par les divers cercles mais il est bel et bien devenu central.

 

Dans une certaine mesure, un tel processus a été la conséquence de l'influence presque exclusive dans la politique américaine de l'époque de Bush junior des idées des néoconservateurs. Les théoriciens de cette orientation, s'éloignant de la formule reaganienne "l'URSS comme empire du mal", ont proposé un projet symétrique : les Etats-Unis comme "empire du bien", "benevolent empire" (R. Kagan).

 

Les néoconservateurs pensent le rôle des États-Unis au XXIème siècle en termes de fonction d'intégrateur global, en tant que nouvelle (postmoderne) version de Rome. Toutes les caractéristiques de l'empire semblent présente dans ce projet :

- stratégie centralisée de gouvernance du monde (Forces armées des États-Unis et de l'OTAN) 

- idéologie globale (démocratie libérale),

- modèle économique unifié (le marché),

- une certaine autonomie des vassaux régionaux (jouissant d'un certain degré de liberté en matière de politique intérieure, mais contraints de suivre strictement la ligne américaine sur les questions fondamentales),

- échelle planétaire (société civile planétaire, globalisation, One World),

- mission de démocratisation et de libéralisation de tous pays et de tous les peuples du monde.

 

Dans un élan d'enthousiasme au début des années 1990, Francis Fukuyama a nommé l'avènement de l'empire mondial américain la "fin de l'histoire". Un peu plus trad, il a reconnu s'être précipité et que l'empire américain planétaire ne constituait pas encore un évènement achevé, mais seulement un projet et un but lointain, sur le chemin duquel pouvaient apparaître des complications, des retards, et, probablement, des reculs tactiques.

 

Dans son ouvrage non moins fondamental, un autre politologue américain, Samuel Huntington, a réunit l'ensemble de ces observations, montrant que l'établissement de "l'empire du bien" global américain se verrait arrêté par le "choc des civilisations". Et Huntington de conclure : le cheminement des États-Unis vers une échelle mondiale se doit d'être progressif et à l'heure actuelle, il importe davantage de consolider le noyau atlantiste (les États-Unis ainsi que les pays de l'Otan) et, en manipulant les oppositions civilisationnelles, d'attendre le moment opportun dans l'avenir. Mais dans tous les cas, la thèse selon laquelle les États-Unis constituent l'empire du XXIème siècle apparaît couramment acceptée dans la science politique américaine, quelle que soit la façon dont on comprend les délais et les frontières spatiales de sa formation.

 

L'élite politique américaine raisonne aujourd'hui en termes d'empires. qui plus est, indépendamment du fait de savoir si ces représentants partagent les idées optimistes et agressives des néoconservateurs ou non. Le démocrate et opposant acharné aux conservateurs Zbigniew Brzezinski, apparaît comme un partisan de l'empire américain tout autant que le sont Dick Cheney, Richard Pearl, Paul Wolfowitz, ou encore William Kristol.

 

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The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center

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