07/12/2014
La démocratie, sacrée ou laïque ? (4)
Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique : La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna
LE PARADOXE DE LA RENAISSANCE : « EN AVANT VERS L'ANCIEN »
Comment dans ses conditions comprendre le fait qu'à l'Époque moderne, l'époque des Lumières et du progrès, l'Europe se soit tournée précisément vers la démocratie dont les traces s'étaient perdues dans les sociétés occidentales plus de deux mille ans auparavant ? En effet, entre l'antique démocratie athénienne et les républiques parlementaires européennes contemporaines, de longs siècles d'histoire de l'Occident avaient été marqués par des systèmes politiques monarchies et aristocratiques. La réponse trouve son origine dans l'époque de la Renaissance.
Cette période porte la responsabilité de nombreux paradoxes qui se sont manifestés seulement beaucoup plus tard. A l'époque de la Renaissance le génie européen a décidé de rejeter les normes rationnelles de la scolastique et de libérer la dimension humaine. Habituellement, ce fait est considéré comme un pas en avant. Bien peu prêtent attention au fait que les acteurs de la Renaissance eux-mêmes avaient justement pris comme modèle l'homme antique de Platon et avaient rejeté les dogmes du catholicisme non pas pour une scientificité laïque qui n'existait pas encore, mais pour des enseignements magiques, alchimiques, pour le mythique et le mystique. En d'autres termes, ils appelaient à une pratique archaïque, à une pratique extatique du ressenti de la sacralité totale du monde. Tant Marcel Ficin, que Giordano Bruno, ou encore Michel-Ange étaient des adeptes convaincus du platonisme, de la Grèce antique, des chercheurs des mystères égyptiens, et des connaisseurs de la kabbale. Leur intérêt pour la démocratie en Europe vient de cet héritage. La démocratie politique a été retrouvée en même temps que Plotin et Hermés Trismégiste, en même temps que la pierre philosophale et que les dieux qui, semble-t-il, avaient depuis longtemps quitté le monde.
The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center
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La démocratie, sacrée ou laïque ? (3)
Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique : La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna
LA MODERNISATION POLITIQUE : DE LA DÉMOCRATIE A LA TYRANNIE
Dans l'histoire de l'Occident ainsi que dans celle d'un certain nombre d'autres civilisations, la modernisation du système politique est passée par le refus de la démocratie, le plus souvent au bénéfice de l'aristocratie et de la monarchie. Et même si dans ce cas le caractère sacré du pouvoir était conservé, le principe rationnel individuel devenait de plus en plus visible. Les décisions politiques étaient prises le plus souvent par des personnalités ou encore des personnalités distinctes et de ce fait comportaient un caractère de plus en plus rationnel et purement humain. En s'éloignant de la démocratie archaïque, la civilisation fuyait le voisinage des dieux du monde où l'humain et le divin sont indissolublement liés. C'est pourquoi Aristote écrivait que « la démocratie donne naissance à la tyrannie ». La tyrannie remplace la démocratie en tant que forme d'organisation politique plus contemporaine où pour la première fois se manifeste très clairement un individu distinct, dans notre cas le tyran. Dans ce processus, « le divin » s'humanise.
The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center
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La démocratie, sacrée ou laïque ? (2)
Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique: La Russie et les idées politiques du XXIième siècle, Chapitre III La démocratie, sacrée ou laïque ?, pp. 57-62, aux éditions Ars Magna
LA DÉMOCRATIE EST FONDÉE SUR L’INÉGALITÉ
La démocratie ne reconnaît aucunement l'égalité des individus. Elle comporte une limite très stricte qui sépare ceux qui ne le peuvent pas. C'est pourquoi, seuls quelques groupes sociaux déterminés étaient reconnus comme participants aux procédures démocratiques. Leur structure est très différente en fonction des sociétés mais le principe d'acceptation de certains dans le processus démocratique et le principe d'exclusion d'autres groupes de ce même processus apparaît comme une caractéristique fondamentale de tous les types de démocratie. Dans les tribus germaniques guerrières, seuls les guerriers libres te les prêtres avaient le droit de participer au thing mais dans la mesure où presque tous les membres de ces tribus (y compris les prêtres) étaient des guerriers, la démocratie militaire germanique apparaît vraisemblablement comme la plus direct et la plus large. Seuls les esclaves capturés lors des attaques, les femmes, les enfants, et naturellement, les étrangers, en étaient exclus.
Dans les cités grecques, on avait adopté un modèle démocratique. A Athènes par exemple, pour participer à la démocratie, il était nécessaire d'être citoyen de la cité, outre la possession d'une certaine richesse matérielle et l'observation d'un certain modèle moral. Les pauvres, les esclaves et les femmes étaient exclus des procédures démocratiques tandis que les étrangers, même les notables d'autres cités étaient nommés idiotes (« exclu », « non-citoyen »). De là, le terme médical contemporain idiot qui trouve son origine dans le concept politique qui désigne celui qui était strictement écarté de la participation à la démocratie.
Dans tous les types de démocratie le choix de ses membres de plein droit était censé garantir la possibilité pour l'esprit des dieux d'intervenir sans obstacles dans le destin de la société.
The Fourth Political Theory: beyond left and right but against the center
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